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Quelle leçon tirer de la période 2008-2009

Sur la trentaine de cas présentés et partiellement traités le 10 avril 2008, seuls trois dossiers faisaient l’objet d’un litige avec procédure devant un tribunal. L’année 2009 confi rme cette tendance.

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Chaussée du moulin de Moussan dans l’Aude – Photo D.Charpentier

L’ origine des diffi cultés coïncidait avec une « rupture » dans la gestion effective du moulin après l’arrêt de l’activité industrielle ou artisanale, lors du choix de concentration économique des gouvernants dans les années 1950 avec le Plan Marshall.

Il s’agit d’une succession, par héritage, partage ou vente du parcellaire du moulin. La majorité demandait éclaircissement et assistance sur trois types de questionnement, à propos de relations diffi ciles de voisinage ou d’interventions de tiers administratifs ou associatifs.
• Imprécisions ou absence de références sur le règlement d’eau et les accessoires d’un moulin à eau dans les actes notariés et documents disponibles.
• Comportements contradictoires des anciens propriétaires ayant des conséquences pénalisantes par rapport au voisinage actuel.
• Interventions incompréhensibles et dommageables de services administratifs ou para- administratifs, liées à la multiplicité de textes réglementaires, en application de lois récentes ne pouvant qu’être ignorées des citoyens.

Le fait que déjà un certain nombre de moulins se soient préoccupés de leur situation juridique par rapport à leur environnement social est la preuve que la FDMF, dès son origine, a eu raison de mettre au rang de ses priorités les questions de droit d’eau et de riveraineté.

Le propriétaire de moulin sait désormais qu’il détient non pas un simple immeuble pittoresque, mais un bien spécifi que qui a une histoire, des droits et des devoirs particuliers. Il sait qu’il peut être menacé et prend les devants en s’informant, en constituant ses archives, classant ses documents et prenant les contacts qui pourront lui être utiles en cas de diffi culté administrative ou de voisinage. Le jour où tous feront cette démarche, la bataille du patrimoine historique et environnemental des moulins sera en passe d’être gagnée.

Les deux premiers questionnements ont été abordés le 10 avril et ont fait l’objet d’un exposé publié dans le numéro 27 de la revue Le Monde des Moulins. N’hésitez pas à faire des demandes complémentaires liées à vos situations particulières.

Le dernier point mérite un nouveau développement et sans doute un changement de stratégie. La présentation par Maître Le Briéro de la loi de 2006 et ses textes d’application montre une accentuation du caractère « loi de police » de la législation française dans le domaine de l’eau et des rivières, avec toutes les conséquences pénales, fi nancières et juridiques que cela implique.

En 2006, le législateur passe d’un objectif de résultat à la prescription des moyens institutionnels et réglementaires afi n d’atteindre le résultat attendu.

Certes la loi du 4 avril 1898 a réglementé l’usage de l’eau, chose commune, mais sans intervenir sur la propriété du lit et des berges. C’était déjà défi nir des moyens réglementaires au service d’un objectif, visant à l’équilibre entre les droits des riverains et l’intérêt général, celui des usagers des lits mineurs et majeurs du cours d’eau, mais sans créer de nouveaux services gestionnaires.

La loi du 16 décembre 1964 a créé l’institution des Agences de Bassin, percevant des redevances pour fi nancer la lutte antipollution. Quant à celle du 3 février 1992, qualifi ée de loi de police, elle aussi a créé les SDAGE et les SAGE, beaucoup réglementaient et déléguaient un pouvoir d’intervention aux collectivités locales. Dans la loi de 1898, un peu moins dans les suivantes, il revenait principalement à la justice administrative ou civile de régler les confl its d’opposition entre la responsabilité propriétale et les droits d’usage reconnus en interprétant la loi dans sa jurisprudence.

Avec la loi du 30 décembre 2006, nous assistons à une véritable mutation dans le droit et la police de l’eau. Son vote a été précédé depuis les années 80 et accompagné de la création de très nombreux comités, colloques et conseils divers, de subventionnements directs ou indirects d’associations agréées, donneurs d’avis privilégiés, quand elles ne sont pas titulaires de délégation de service public.

Il n’y a jamais normalement d’exercice d’un droit sans encadrement et possibilité de sanction, donc sans pénalité et police générale, mais dans le cas présent, il y a en plus renforcement ou création de nouveaux gestionnaires du domaine fl uvial domanial et non domanial.

Ambitions européennes et intérêts français.
Le Conseil et le Parlement européens avec la publication de la DCE du 23 Octobre 2000 ont fi xé à 2015 le rétablissement du « bon état écologique
des milieux aquatiques ». Cette directive a été transposée en droit français par la loi du 21 avril 2004, qui en est l’interprétation à la française et qui a ouvert le débat parisien entre les partisans du « pollueur – payeur » et les trois lobbies, des agriculteurs et leurs soutiens industriels, celui des marchands d’eau, et celui des Collectivités Locales.

Après le projet de Dominique Voynet, ce n’est qu’en 2002 qu’Yves Cochet présente le sien à l’Assemblée avec une taxe sur les nitrates, taxe reprise dans le nouveau projet Bachelot, mais supprimée dans celui de son successeur Serge Lepeltier. C’est Nelly Olin qui porte un projet quasi identique en mai 2006 et prépare le vote du 30 décembre 2006, que nous connaissons.

Les trois lobbies ont limité les dégâts en ce qui les concerne, avec quelques alliés parfois inattendus et discrets. Ils ont laissé leurs adversaires habituels, FNE et pêcheurs, se satisfaire et satisfaire le Ministère au détriment des riverains de cours d’eau et surtout des consommateurs d’eau qui supporteront la très grosse part des dépenses. Les associations de riverains ont bataillé, sauvé l’essentiel de l’article L- 210- 1. et obtenu un peu de liberté de manoeuvre au niveau local, grâce à des parlementaires ayant une bonne connaissance du monde rural et de
sa complexité.

Depuis le 30 décembre 2006, ce qui est inquiétant, ce qui est positif.
Avec la loi et les premiers textes d’application, le comportement anticipatif de quelques fonctionnaires et le laisser-faire de quelques élus ont fait apparaître des atteintes réelles à terme aux droits et usages. Le renforcement d’institutions qui ouvertement sur le terrain agissent ou tentent d’agir en lieu et place des propriétaires, sans justifi cations scientifi ques évidentes et sans que l’article 101 du Code Rural, la mise en demeure préalable par l’autorité administrative, n’ait été exercée, sont un signe d’atteinte aux droits des citoyens. Certains d’entre vous l’ont vécu depuis 2007, sans toujours, faute d’information complète, en avoir mesuré l’exacte portée.

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Vannes du moulin des Princes à Chantilly – Photo E.Charpentier

Derrière tout cela, il y a une idéologie qui est bien résumée par le slogan : la trame verte et bleue, sensée justifi er l’arasement des barrages et des chaussées au nom de la continuité écologique et piscicole, comme si les anguilles de tous temps n’aient pas su se rire de l’obstacle des chaussées et rejoindre la mer des Sargasses. Pour descendre, il fallait bien qu’elles soient montées !

Ce qui est précisément inquiétant.
1- Quelle sera la pratique de l’Offi ce National de l’Eau et des Milieux Aquatiques, qui est le renforcement du Conseil Supérieur de la Pêche, dont l’objectivité n’a pas toujours et partout été constatée. ?
2- Sauf à augmenter les impôts locaux, quel sera le rôle de ces services dépendant des collectivités locales qui, sous des noms divers, sont habilités par les textes à intervenir chez les riverains… après des enquêtes d’utilité publique ou d’intérêt général, telles que nous les voyons fonctionner trop souvent ?
3- Les groupes de pression, constitués derrière la trame verte et bleue et les demandeurs de suppression des barrages, auront-ils toujours accès
aux moyens fi nanciers publics? Ce qui leur permet de présenter avec autorité leur conception des rivières dans les comités et conseils des SDAGE et SAGE où leur « agrément » leur donne une place de choix pour les orientations des politiques publiques. Quand y sera-t-il créé un groupe de riverains authentiques et connaisseurs réels des lieux ?

Ce qui est positif.
1 – A l’article L 210-1, l’alinéa ci-dessous a été réécrit : «… dans le cadre des lois et règlements ainsi que des droits antérieurement établis, l’usage de l’eau …» Ce texte est essentiel car il protège les droits antérieurement acquis (qui ne sont pas des privilèges, mais résultent d’ achats ou de concessions en échange de services rendus), ce que sont les droits fondés en titre, que certains annoncent comme devant être abolis en 2012 !
2 – Un article essentiel de la loi du 2 février 1995, écrit à l’article L214-12 du Code de l’Environnement pour la sécurité et la tranquillité des riverains du point de vue de leur responsabilité civile en cas d’accident survenu à un tiers ayant pénétré chez eux, est maintenu : « La responsabilité civile des riverains des cours d’eau non domaniaux (l’équivalent existe pour le domaine public fl uvial) ne saurait être engagée au titre des dommages causés ou subis à l’occasion de la circulation des engins nautiques de loisir non motorisés ou de la pratique du tourisme des loisirs et des sports nautiques qu’en raison de leurs actes fautifs».
3 – Le rôle du Préfet en tant que garant de l’opportunité et de la régularité de travaux ou d’intervention de services publics ou délégataires de service publics, est précisé au cours de plusieurs décrets d’application. Son rôle de consultation élargi lui permet de consulter et d’associer les riverains directement concernés. Cela doit être expérimenté, mais ouvre un rôle important aux associations locales de la loi de 1901, mais surtout aux associations syndicales libres de riverains qui jouissaient déjà, si elles s’en étaient donné les moyens, d’une autorité non négligeable. Ce dernier point peut permettre au Préfet d’arbitrer utilement entre les objectifs généraux des promoteurs de textes réglementaires et la réalité vécue sur les bassins des rivières.

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Chaussée du moulin de Chitrée à Vouineul – Photo E.Charpentier

Michel DES ACCORDS – Article paru dans le n°29 du Monde des Moulins – Juillet 2009

Catégories : Législation

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