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Première approche de la mouture du blé par l’étude du grain, de ses composants, des produits qu’ils génèrent, termes et définitions.

Première partie

Les céréales, dont le blé, sont des aliments très précieux qui ont fortement contribué à l’évolution de l’humanité.
À quelques exceptions près, l’homme y trouve tous les éléments nécessaires à sa nourriture (la capsule d’énergie). Malheureusement, leur consommation sans transformation est très diffi cile (le fruit immangeable), la valorisation se fait à la fois par une élimination totale ou partielle des enveloppes externes et par une réduction de grosseur, c’est le travail du meunier, communément appelé la mouture.

Exploration d’un grain de blé
Imaginons une descente dans un trou foré dans ce grain de blé.

mout1

mout2

D’abord, on traverse le péricarpe, (1) alvéolé et souple. Il se divise en trois sous-couches (l’épicarpe, le mésocarpe et l’endocarpe). Cet ensemble a pour rôle la protection de l’amande et du germe, et la filtration de l’air qui leur apporte l’oxygène nécessaire aux transformations chimiques lors de la germination.
Ensuite, on aborde l’enveloppe de l’amande proprement dite ou faisceau nourricier. Elle est aussi composée de trois membranes : le tégument séminal (2), la bande hyaline (3) et enfin l’assise protéique (4). Nous sommes alors à une profondeur d’environ 1/10 du diamètre moyen d’un grain de blé qui est de 3 mm.
Le péricarpe est constitué de cellulose et de minéraux (il est proche du bois).
Le tégument séminal contient également de la cellulose et des minéraux (potassium, phosphore, soufre) en moindre quantité, avec en plus des pentosanes ou gommes (il est proche des légumes). La bande hyaline est très majoritairement de la fibre et du calcium. L’assise protéique contient en plus de la céréaline (azote).

En poursuivant notre descente, nous entrons dans l’amande : sur notre route, nous traversons des cloisons transparentes délimitant des cellules à l’intérieur desquelles sont stockés de drôles de sacs en gluten (protéines = azote) pleins d’amidon (sucres lents = glucides) communément appelés « les grains d’amidon ». Les premières pièces (5) sont comblées par de très petits grains, les suivantes (6) de taille plus grande contiennent des grains plus gros et enfin les grandes chambres suivantes (7) de très gros grains.
Aux deux-tiers de notre descente, nous traversons, après une ultime membrane, un univers odoriférant rappelant la noisette lorsque le blé est jeune et le rance lorsqu’il est trop vieux : le scutellum (8). Il est plein d’essence huileuse (diastases, lipides et vitamines), il environne un embryon en forme de graine (10) ; à l’intérieur, flottent la gemmule (9) et les radicules (11). Cet ensemble (de 8 à 11) est connu sous le nom de germe (il génère une forte activité enzymatique), sa couleur caractéristique est un vert-jaune très clair.

Quelques pourcentages pour mieux comprendre.

Un grain de blé
L’enveloppe 4,36 % du grain (en poids)
L’amande 84,21 % – –
Le germe 1,43 % – –

Composition biologique.
Amidon 64,50% du grain
Protéines (gluten) 12,00% – –
Eau 13,50 – –
Cellulose 2,50% – –
Matières grasses 2,50 % – –
Sucres 3,00 % – –
Matières minérales 2,00 % – –

Les éléments
Substances assimilables par l’homme 68, 00 %
+ Eau 13, 50 %
+ Substances azotées 12 ,50 %
+ Huiles 1, 50 %
Total ingérable : 95, 50 % du grain

Substances non assimilables par l’homme (le bois) 2,70%
+ Sels minéraux 1,80%
Total : 4,50 % du grain

Transformation mécanique en vue de se nourrir de ce fruit en le transformant en farine

Au préalable, l’incontournable nettoyage.
Les lots de blé reçus au moulin contiennent des graines étrangères, des grains anormaux, des déchets inertes (pierres, pailles…) dans une limite tolérable par la législation, ils doivent quand même être nettoyés pour produire de la farine destinée à l’alimentation humaine.
Des outils doivent permettent de trier les impuretés autres que le blé « sain », par procédé de séparation.

Complément indispensable, le conditionnement

Ultime étape de préparation du blé à la mouture : des opérations de mouillage et de repos sont nécessaires pour faciliter la séparation des enveloppes et de l’amande. Suivant la dureté du blé, les temps de repos peuvent aller de 12h à 48h. En étant plus élastiques, les enveloppes sont moins friables, ce qui limite les brisures d’enveloppes dans les farines.
L’amande du grain devient, elle, plus friable. Le blé au naturel contient 12 à 13 % d’eau, humidifi é 14 à 15 % pour la mouture sur meules et 16 à 17 % pour la mouture sur cylindres.

Essai d’explication pour une mouture de froment (blé tendre meunier)

A) Séparer l’amande farineuse du grain de blé de ses enveloppes.
Blé entier = amande farineuse 85% + enveloppes 15%
Il y a trois couches d’enveloppes : la plus externe, le péricarpe, 4% (qui produit l’essentiel du gros son), la seconde qui entoure le tégument séminal, 2% (base du fi n son) et la troisième, l’assise protéique, entre 7 et 9 % (qui génère les remoulages blancs, bis et gris, de leur nom originel, les recoupes).

B) Disloquer les différents éléments qui constituent cette amande ou albumen amylacé.
Amande farineuse = gluten 17%+ amidon 80%+germe 2%+ assise protéique de à 0,6 à 1%*
*Le chiffre est différent selon la volonté du meunier d’inclure l’assise protéique ou non, entière ou partie, dans la farine.
– Deux composants essentiels (gluten et amidon) qui se présentent, après la trituration, sous forme de petits sacs en gluten remplis d’amidon formant un grain ; l’amalgame de plusieurs grains est une semoule.
– Et enfin, le germe (vitamines et matières grasses).

C) Convertir
Par réduction des semoules et autres éléments (germes et fibres) pour faire une fi ne poudre « la farine ».

Abordons la mouture

Quelques définitions :
– Boulange : produit de broyage.
– Issue : tout ce qui n’est pas de la farine (gros son, fi n son, recoupes).
– Semoules : fragments d’amande (plusieurs grains d’amidon) parfois entourées d’enveloppe, on les dit alors « vêtues ».
– Gruaux : les semoules provenant des couches externes de l’amande, enrobées d’assise protéique.

Attention : réponse à une question très souvent posée

Le refus de la boulange au premier tamisage après le premier passage entre meules ou cylindres fut nommé « gruau ».
Longtemps catalogué comme issue secondaire, ce produit est pourtant composé de beaucoup de gluten, d’amidon, et de bons fragments de l’assise protéique.
Ce produit très riche fut par la suite retravaillé et deviendra la meilleure des farines connue sous le nom de « farine de gruau » ; elle enrichit considérablement nos farines actuelles.

– Finots : semoules aplaties et blanchies par claquage (meules plates aux nombreux et fi ns rayons ou cylindres lisses)
– Farines : semoules blanches réduites par le convertissage (meules compactes à larges rayons ou cylindres lisses).
– Mouture : la configuration morphologique du grain de blé avec son sillon rentrant profondément l’enveloppe dans l’amande interdit la réduction par abrasion et oblige une fragmentation de plus en plus fi ne. Elle
est basée sur deux principes :
1. Projection violente du grain contre des aspérités ou sur des surfaces dures, provoquant une fragmentation.
2. Ecrasement entre deux surfaces dures mobiles l’une par rapport à l’autre.
Il est salutaire de pratiquer ces actions mécaniques du centre du grain de blé vers sa périphérie, les grains d’amidon avec leur enveloppe de gluten sont de plus en plus petits et de ce fait le pourcentage de gluten est plus grand.

NB : Les différentes actions de fragmentation écrasement d’une mouture progressive sont :
* le broyage : ouverture du grain ;
* le claquage : extraction / réduction / blanchiment des « gruaux » en « finots » ;
* le convertissage : séparation et réduction de toutes les « semoules propres ou finots » en farine.
Entre chaque passage est pratiqué un classement granulométrique par tamisage :
* le blutage : les ouvertures de mailles varient de 1150 microns (1,150 mm pour les plus ouvertes à 80 microns (8 centièmes de mm) pour les plus fermées. Chaque tamis provoque un « refus » et une extraction. L’extraction du tamis le plus fermé donne la farine.

Bref inventaire et destination des produits finis
– le gros son nourrit les ruminants
– le fi n son pour les animaux équipés d’un appareil digestif moins sophistiqué
– les recoupes pour les omnivores tel le porc
– la farine fi ne ou fluide majoritaire en amidon est utilisée pour les crêpes, les sauces et quelques gâteaux
– la farine de gruaux pour les viennoiseries et les génoises
– la farine blanche (tout l’amidon et tout le gluten) pour le pain blanc neutre en goût, hypertrophié, et à conservation réduite
– la farine bise (contient tout l’amidon et tout le gluten, plus le germe « à condition qu’il soit frais ! » mais aussi le meilleur de l’assise protéique), c’est la farine du bon pain français, moelleux à la « mâche », au goût
de beurre et de noisette et à l’odeur de froment et de caramel
– la farine complète facilite le transit intestinal par les bons éléments des enveloppes de l’amande (faisceau nourricier)
– les autres farines chargées en péricarpe sont, pour moi, impropres à la consommation humaine mais très lucratives et elles sont pour cela bien trop répandues.

À ce stade, l’on peut d’ores et déjà mesurer les difficultés de l’art du meunier, nous aborderons une autre fois les techniques et les outils nécessaires à la réalisation des principes énoncés ci-dessus.

Alain Mazeau

Lire le chapitre 2 >>

Article paru dans le Monde des Moulins – N°42 – octobre 2012

Catégories : Technique

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