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En France, on n’a pas de pétrole mais on a des idées… de génie !
Sur la commune de Boé, à 2 km du centre ville d’Agen se trouve un barrage sur la Garonne au lieu dit « Beauregard ». Ce barrage édifi é au XIXème siècle pour alimenter par gravité le canal latéral à la Garonne a été désaffecté vers les années 1950 en raison d’une alimentation depuis
Toulouse. Depuis lors, il s’est dégradé faute d’entretien et il est actuellement dans un état de délabrement avancé.
Ce barrage est propriété de l’état, il n’a jamais servi à la production d’énergie hydroélectrique. Depuis quelques années, un débat s’est engagé entre les élus de l’agglomération agenaise et les services de l’état : quel devenir pour ce vestige de barrage ? Une association pour la réhabilitation du seuil de Beauregard a vu le jour, présidée par Guy Saint Martin, conseiller général et régional. L’association des Amis des Moulins du Lot et Garonne en fait partie. Une étude poussée et coûteuse a été menée par le SMEAG*.

Cette étude a consisté en un état des lieux, une analyse technique et juridique et propose quatre pistes :
A/ laisser l’ouvrage se dégrader complètement
B/ araser le seuil au niveau de sa fondation (B1) ou l’aménager à minima (B2)
C/ reconstituer le seuil sans aménagement hydroélectrique
D/ reconstituer le seuil avec aménagement hydroélectrique.
L’association pour la réhabilitation est porteuse de cette dernière solution.
La communauté d’agglomération d’Agen (CAA) toutes tendances politiques confondues a voté à l’unanimité une résolution en vue du rachat du site pour 1 € symbolique. Les services de l’état DDAE*, l’agence de l’eau Adour Garonne, les pêcheurs, l’ONEMA*, les associations de défense de l’environnement SEPANLOG* sont contre.

L’étude, nettement orientée, préconise la solution B1, rejette carrément la solution D pour les raisons suivantes :
• la reconstruction du seuil (2m) constituerait un obstacle quasiment infranchissable pour les grand migrateurs « amphihalins » (alose, anguille, lamproie) et ceci malgré la présence de deux passes à poissons et d’une rivière de contournement
• débit solide freiné (frayères aval) malgré deux clapets abaissés en période de crues.
• réchauffement dû à la présence du plan d’eau
• bilan économique négatif sur 50 ans malgré la production d’énergie.
A cela, nous opposons les arguments suivants :
• il n’y a plus de poissons au niveau de Golfech où un comptage montre la chute vertigineuse des populations en quelques années. Les grands migrateurs ne remontent plus la Garonne en raison de la sur-pêche en mer, en estuaire (les piballes) et des pollutions humaines, biologiques et agricoles. Et ce n’est pas le barrage qui freine les migrations, puisque il n’y a pratiquement plus de seuil !

beauregard
Barrage de Beauregard – Photo DR

• la reconstruction avec deux passes à poissons (2,6 et 7,4 m3/s), une rivière de contournement (30 m3/s) des turbines VLH, deux clapets, offre toutes les garanties de transit dans les deux sens pour les migrateurs. On sait aussi que les turbines VLH sont quasiment sans risque pour les poissons à la dévalaison, des mesures expérimentales faites à Millau l’ont démontré.
• le projet prévoit 6 turbines VLH avec un débit aménagé de 160 m3/s alors que le module de la Garonne à Agen est de 400 m3/s. Il y aurait donc une très grande modularité et ainsi une alimentation constante des aménagements de transit. En outre, cette modularité est telle que le débit en sur-verse serait toujours garanti. On sait que les migrateurs ont une capacité étonnante de franchissement par saut dans la cascade.
• le réchauffement dû au plan d’eau est négligeable comparativement à la centrale nucléaire de Golfech immédiatement en amont. Il faut rappeler que cette centrale a fonctionné par dérogation au cours de l’été 2003 à cause de l’élévation excessive de température qu’elle induit. A qui voudrait-on faire croire qu’un plan d’eau peut induire un réchauffement signifi catif ? C’est oublier aussi l’oxygénation dû à la cascade.
• l’étude économique faite sur 50 ans est biaisée, elle conclut à un bilan global négatif compte tenu de la forte valeur attribuée au « patrimoine » halieutique. C’est une contre vérité surprenante : sans retenue, il y aurait une très forte valeur ajoutée dûe aux poissons migrateurs. Avec la retenue cette valeur « patrimoniale » serait nulle ! Nous nous inscrivons en faux contre cette affi rmation ! D’une part, il est inexact de dire que les migrateurs sont incapables de franchir l’obstacle malgré tous les aménagements, d’autre part, la présence du plan d’eau reconstitue une très grande richesse biologique : espèces d’eau calme, oiseaux, fl ore et faune aquatique variées.
• la présence du plan d’eau crée une richesse économique : activités nautique et touristique.
 • le plan d’eau est nécessaire à la réalimentation des nappes phréatiques, il est indispensable pour assurer la pérennité de l’alimentation en eau de la ville d’Agen
• l’abaissement de la ligne d’eau sans le barrage conduirait à un affaissement des berges.

Des travaux de renforcement sont prévus, mais qui peut garantir que ces travaux seront suffi sants ? Faut-il rappeler l’exemple de Mallemort sur la
Corrèze où l’effacement d’un barrage a créé de  graves désordres aux piles d’un pont et des travaux de renforcement coûteux ?
• la solution « D » ne serait pas coûteuse pour la collectivité puisque la charge en serait assurée par une entreprise privée. Au contraire, la solution préconisée dans le rapport (B1) coûterait plusieurs millions d’Euros à la collectivité.
• les travaux de réhabilitation, la construction et la maintenance d’une centrale hydroélectrique créerait des emplois.
• la production d’énergie renouvelable est un objectif du Grenelle de l’environnement, 23% en 2020. Cette centrale hydroélectrique d’une puissance de 2,5 MW et d’une productivité annuelle de 15 GWh y contribuerait d’une manière signifi cative. En outre, elle permettrait l’économie de l’émission d’une grande quantité de CO2 et autres GES* générés par les centrales thermiques en période de pointe. Il faut savoir en effet qu’EDF, en période de pointe, fait appel à des centrales thermiques extrêmement polluantes (gaz, fuel et même charbon !)

Le président Guy Saint-Martin a rencontré le préfet qui n’a pas pris position et demande des études complémentaires ! Il a également écrit au  président du SMEAG pour lui faire part de nos observations. Le dossier devrait être présenté au ministre Jean- Louis Borloo qui devrait venir sur le site et arbitrer. Notre association départementale soutient le projet de réhabilitation. Nous espérons vivement que cela se fasse dans le sens du développement durable et des énergies renouvelables.

ONEMA : Offi ce national de l’eau et des milieux aquatiques
SEPANLOG : Société pour l’étude, la protection et l’aménagement de la nature
SMEAG : Syndicat mixte d’études et d’aménagement de la Garonne
GES : gaz à effet de serre
DDEA : Direction départementale de l’équipement et de l’agriculture

Michel PIERRE – Article paru dans le n°30 du Monde des Moulins – octobre 2009

Catégories : Législation

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