Zoom sur un moulin producteur pendant le confinement.
Depuis que la farine manque dans les supermarchés, le Moulin de la Ribère, à Mauvezin, est assailli de commandes. Dernier moulin à eau du département, il tourne à plein régime.
C’est un bijou de notre patrimoine qui se rappelle à nous ! Depuis que la farine se fait rare, le Moulin de la Ribère, à Mauvezin, dernier moulin à eau en fonction dans notre département, connaît un regain d’attention de la part des consommateurs. Particuliers, boulangers et grandes surfaces se sont subitement souvenus, ou ont appris qu’il existe encore un moulin capable de fournir de la farine chez nous ! « Il aura fallu que l’on soit confiné pour qu’on se rende compte que la farine est un des aliments les plus essentiels », raconte Pierre Cabarrou, meunier passionné et propriétaire du Moulin de la Ribère. « Les gens ont envie de refaire le pain chez eux et occupent les enfants en leur faisant faire des gâteaux. Ils veulent donc de la farine… »
Mais, depuis quelques semaines, difficile de mettre la main sur la précieuse denrée dans les rayons des supermarchés. Une pénurie bien réelle, confirmée par Mathieu Lagorce, directeur commercial d’Intermarché à Tarbes. « Nous avons des difficultés d’approvisionnement depuis le début du confinement. Est-ce que c’est lié à une surconsommation des clients ou autre ? Nous n’arrivons pas à avoir de réponses du côté des centrales d’achat. » C’est donc vers le circuit court et local que se dirigent apprentis pâtissiers et professionnels du secteur alimentaire.
Ton moulin va trop vite ?
Depuis le début de la pénurie de farine, le téléphone sonne constamment au Moulin de la Ribère. « Ce sont beaucoup de grandes surfaces qui me contactent, indique Pierre. Il y a même un Intermarché de l’Aude qui m’a appelé », indique Pierre. Mais le meunier nous explique qu’il refuse ces nouvelles commandes, faute de temps.
« Un moulin à eau, ça n’a pas le même rendement qu’un moulin électrique ou une fabrication industrielle. J’arrive à produire environ 25 kg de farine par heure, alors que dans les minoteries industrielles, ils font 10 tonnes. » Pourtant, le son qui vrombit depuis la salle des meules évoque une horde de chevaux au galop ! La force de l’Arros vient activer le vieux mécanisme de bois, 17 heures par jour. Farine de blé, maïs, seigle et petit épeautre, la qualité de la mouture est inégalable !
Mais, cette production artisanale, certifiée Bio, il souhaite la réserver à ses clients de toujours. « Actuellement, je me lève à 3 h 30 le matin pour mettre en route le moulin. J’y travaille jusqu’à 20 heures pour pouvoir livrer mes clients. C’est ma façon de les remercier pour toutes ces années où ils sont venus me prendre de la farine. Grâce à eux, on a pu remettre le moulin en marche ! »
Car Pierre est devenu meunier, une fois à la retraite. C’est en 2009 qu’il crée, avec son épouse et ses enfants, une association pour sauver ce moulin familial. « Mon père était meunier, j’ai appris avec lui, mais je n’ai jamais pu en vivre. On a réussi à le refaire fonctionner, 50 ans après que mon père eut arrêté son activité. » Habituellement, Pierre Cabarrou et sa femme reçoivent du public : visites, vente directe de farine, stages pour apprendre à faire le pain, etc. Ils ne se versent aucun salaire. Les recettes servent intégralement à l’entretien du moulin. Espérons que les consommateurs se souviendront du Moulin de la Ribère une fois la crise passée. Acheter sa farine, c’est contribuer à préserver cette merveille de notre patrimoine…
La Dépêche du Midi – Publié le 14/04/2020
Site du Moulin : moulindelaribere.com
Sophie Loncan
Article publié dans le Monde des Moulins n° 73 de juillet 2020
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