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Dans le Monde des Moulins n° 66 d’octobre 2018, nous avons raconté l’histoire d’un couple de meuniers champenois pendant la Grande Guerre.
Grâce à l’obligeance des propriétaires actuels du Moulin du Magny aux Riceys (dans l’Aube), que nous remercions vivement, nous pouvons vous communiquer quelques renseignements complémentaires sur l’histoire du moulin.

Le Moulin du Magny, sur la Laignes, en amont du village viticole des Riceys, est une usine qui existe de « temps immémorial », formule passe-partout signifiant qu’il était en place avant la Révolution. Nous n’en savons pas plus. En 1831, c’est le plus important du village qui en compte six. Il est équipé de deux paires de meules, d’une huilerie et d’un foulon.

Carte postale : Le Moulin du Magny en 1914

 

En 1914, il existe encore cinq moulins à farine aux Riceys mais il semblerait qu’un seul, celui du Magny, ait fonctionné pendant toute la durée de la guerre ; un autre, le Moulin de Saint-Louis (ou de Lanne) reprit du service en 1919.

Lorsque la guerre éclate, le Moulin du Magny vient d’être acheté par les Bailly au sieur Lardin pour quinze mille francs. Il est équipé de cylindres pour moudre la farine panifiable et d’une paire de meules pour faire la farine destinée aux animaux. Une chaudière à vapeur est mise en fonctionnement lors de l’étiage important de la rivière en été. L’équipement est donc de qualité et moderne mais les bâtiments sont vétustes et la meunière prévoit de vendre le moulin après la guerre, afin d’éviter de longs et coûteux travaux.
Mais le destin en décide autrement : le meunier meurt de ses blessures en octobre 1918. Son corps est ramené au cimetière de Ricey-Haute-Rive en 1923. Cependant, nous perdons la trace de son épouse et de sa fille qui ne figurent plus sur le recensement des Riceys en 1921. L’ouvrier principal, le père Gillot, est alors recensé comme farinier et, vraisemblablement, il reste travailler au Magny.
D’après les recherches effectuées par les propriétaires actuels, à une date qui reste encore à préciser, le moulin a été acquis par le meunier du Moulin de Saint-Louis, le sieur Gillot Dartagnan, qui l’exploite avec son fils Gillot Bernard.
Nous savons que les vannes de décharge ont été reconstruites en 1924.

En juin 1940, alors que le moulin appartient à la famille Gillot, c’est l’exode avec son triste cortège de réfugiés errants sur les routes pour fuir l’invasion allemande…

Le Moulin du Magny en 2018 – Photo C. Tartre

Un petit garçon âgé de neuf ans fuit en charrette à cheval avec ses grands-parents et des gens de son village. Il raconte que le 15 juin 1940 ils sont mitraillés par des avions ennemis. Ils se réfugient dans une maison à la sortie du village en contrebas de la route (le Moulin du Magny) où ils s’entassent pour se protéger. Mais, pour finir la besogne, l’ennemi envoie des bombes dont une traverse le corps d’habitation où les réfugiés se terrent. Couvert de farine, l’enfant réussit à s’enfuir par une fenêtre avec sa grand-mère. Il a eu de la chance : l’habitation du meunier est entièrement pulvérisée et dans les décombres on retrouve cinquante-sept victimes dont son grand-père.

La Laignes et le canal de décharge – Photo C. Tartre

À l’arrière du moulin, la pièce où était installée la chaudière – Photo C. Tartre

Vue aérienne du Moulin du Magny (au 1er plan, en bas, à droite) et des 3 Villages des Riceys – Carte Postale CIM 1960

 

Le meunier aménage un logement dans la grange et le moulin fonctionne jusqu’en 1955 environ, date à laquelle il est acheté par Madame Bouin et Monsieur Damace qui le laissent à l’abandon.
La propriété, très délabrée, a été achetée en 1960 par Monsieur Pierre Espaullard qui l’a restaurée en effectuant quelques transformations. Ses enfants l’habitent encore aujourd’hui.
Si les ouvrages hydrauliques sont en état de fonctionnement (déversoir, vannes, bief, canal de décharge), il n’en est pas de même pour les équipements de mouture, et le moulin garde peu de vestiges de son passé farinier. La roue est en ruine, les cylindres ont disparu, il reste seulement la paire de meules utilisée pour la farine animale ainsi que le socle du moteur Bernard à gaz pauvre (qu’on entendait à cinq cents mètres à la ronde quand on le mettait en route !) qui avait succédé à la chaudière à vapeur utilisée par les Bailly.

Catherine Tartre
Association des Moulins à Vent Champenois

Article paru dans Le Monde des Moulins N°70 – octobre 2019

Catégories : Histoire

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