Le site des Moulins de France
ArabicBasqueBelarusianBulgarianCatalanChinese (Simplified)CzechDanishDutchEnglishFinnishFrenchGermanGreekHebrewHungarianItalianJapaneseLithuanianNorwegianPersianPolishPortugueseRomanianRussianSpanishSwedishTurkishUkrainian

En tant que conseiller technique permanent chargé par la Fédération Des Moulins de France, des relations avec la meunerie française et les instances céréalières, j’ai entrepris depuis le printemps 2007 plusieurs démarches auprès des organisations nationales. Cellesci ne me sont pas étrangères puisque j’en fus membre actif jusqu’en décembre 2003, date de l’arrêt des productions industrielles du moulin de la Pauze à St Meard de
Dronne (Dordogne).
L’ Association Nationale de la Meunerie Française (ANMF) regroupe la quasitotalité des producteurs de farines. Des élus régionaux et, à tour de rôle, les rapporteurs des multiples commissions, présentent les résultats de leurs travaux au sein de cette association. Dans ma vie de patron meunier, je fus président de la Dordogne, vice-président d’Aquitaine et rapporteur du groupe dénommé en ce temps-là « farines de meules et biologiques » aujourd’hui simplement « groupe bio ». A ce jour, nous pourrions qualifi er notre état de « meuniers de l’archéologie-industrielle » car nous oeuvrons journellement pour la sauvegarde de la mémoire collective. Une association qui nous est proche et dont bon nombre d’entre nous sont adhérents, le syndicat de défense des moulins et cours d’eau, est hébergée dans ses locaux. L’ANMF fonctionne grâce aux cotisations versées par ses membres au prorata des quintaux de farines qu’ils vendent. Un juriste s’occupe à plein temps des contingents, des droits de moutures, et de tout ce qui gravite autour.

cont1
Minoterie CAPLA à Saverdun (Ariège) – photo M. Sicard

Le 6 juin 2006, la circulaire n° 4891 annonçait aux adhérents de l’ANMF une adaptation de la législation par ordonnance offi cielle n°20006 du 23 mai 2006. Ces mesures qui nous concernent suscitent de nombreuses interrogations auxquelles je vais essayer d’apporter des réponses. Les propos qui suivent n’engagent que moi et sont mes propres interprétations consécutives à différentes conversations que j’ai eues avec les uns et les autres.

Où en est le décret d’application ?

Une réunion devait se tenir en septembre 2007 avec les organismes offi ciels ; Ministères de l’agriculture, de l’économie, Offi ce National Interprofessionnel des Grandes Cultures, Douanes… Cette confrontation n’a, à ce jour, toujours pas eu lieu ; c’est seulement après sa tenue que le décret paraîtra.

Le seuil de tolérance pour les moulins sans contingent est-il fixé ?

Les précédentes entrevues avaient fi xé le seuil de la dérogation à un possible écrasement de 300 quintaux de blé annuel.

Quelles sont les modalités d’enregistrement auprès de l’ONIGC ?

Un mois avant le début de l’activité, il faut impérativement faire une demande auprès du bureau du service des Douanes le plus proche du moulin, car c’est à lui que l’on a confi é le contrôle des impôts indirects. Ensuite si ONIGC ne vous contacte pas consécutivement à votre requête auprès des douanes, il vous faudra contacter son service des interventions, 21 avenue Bosquet, Paris 75 341 cedex 07. C’est ce service qui doit vous attribuer le numéro ONIC. Cette immatriculation, attribuée à tout moulin faisant de la farine, est indispensable pour avoir le droit de moudre.

Quelles sont les exigences d’ONIGC en matière de déclaration ?

• Renvoi mensuel d’un état 8 dûment complété. C’est un imprimé délivré par l’ONIGC. Il a pour but de suivre mensuellement l’activité de la meunerie. Après avoir indiqué l’identité du déclarant, les différentes activités
du moulin doivent être décrites ainsi que l’engagement d’une comptabilité conforme. Suivent 3 pages avec cases à remplir très détaillées sur l’état des stocks de matières premières conventionnelles ou biologiques, blé
ou autres céréales, et des produits fi nis en l’occurrence les différentes farines. La page suivante est une ventilation très fouillée des sorties de farines de blé par départements, avec l’énumération des différents utilisateurs (ex : boulangers, pâtissiers, particuliers etc…) et des différents conditionnements (ex : sachets, sacs, vrac etc…). Il est à préciser qu’une déclaration ayant trait  à la bio peut entraîner un signalement aux services des fraudes de la concurrence et des prix, qui pourront vous demander votre agrément et vos rapports de contrôles d’organismes certifi cateurs et vérifi cateurs !
• Renvoi annuel de l’enquête de branche obligatoire dite « PRODCOM » ; questionnaire récapitulatif de la production d’une année et des sommes qu’ont engendré les ventes hors taxes. Notons que ces deux déclarations ne sont pas à remplir par les sous-traitants et les négociants.

Quelles sont les exigences fi scales et sanitaires actuellement en vigueur qui nous seront imputables ?

• L’obligation de tenir un registre spécial dit à l’usage des moulins, qui sert à la direction générale des impôts pour qui travaillent les douanes.
• Une comptabilité en bonne et due forme, avec sa caisse et son brouillard tenu à jour.
• Obligation d’acquitter la taxe FFIPSA ex BAPSA de 16€/tonne de farine.
• Cotisation volontaire obligatoire sur les farines CIFAP qui sert la promotion et qui coûte 0,40€/ tonne de farine.
• Respect très strict des taux de cendres avec mention obligatoire sur l’emballage, celle-ci devant correspondre exactement à ce qu’il y a à l’intérieur (ex : une T110 ne couvre en aucun cas une T45 et inversement) ; les deux cas sont passibles du tribunal correctionnel.
• Mention de la date de péremption, 9 mois pour la farine.
• Mention des ingrédients ( % de seigle, de l’humidité maximum 15%, du numéro emballeur qui est délivré par les services des fraudes de la concurrence).
• Respect des normes d’emballage et de fermeture (ex : pas d’agrafes métalliques).

Comment adhérer à l’ANMF et pourquoi ?

Demande écrite au président que celui-ci fait ratifi er par son conseil( 66 rue de La Boétie, Paris 75008). Pour nous, le problème lié à la cotisation proportionnelle aux quintaux de farines vendus, induit la demande et l’acceptation d’un forfait. La mémoire et la maîtrise du contingentement sont détenues par l’ANMF, et seulement mis à la disposition de ses membres. ONICG a le pouvoir décisionnel administratif mais ne peut rien sans les sources ANMF. Il est à noter que l’ANMF pilote la convention collective de la meunerie française.

En attendant la parution du décret, une tolérance existe-t-elle ?

Aucune tolérance ; sans contingent la mouture est illégale et sujette à sanctions.
Cependant à ce jour, aucune affaire n’est en cours car le principe d’une dérogation est établi mais son seuil n’est pas encore fi xé ni ratifi é et il serait mal venu de verbaliser des gens qui, sitôt parution du décret, seraient
dans leur droit.

A quelles conditions l’approvisionnement en culture est-il soumis ?

Tout acheteur de blé doit tenir un registre connu sous le nom ONIC / état 1. Le seuil supérieur pour l’obligation d’obtention auprès de ONICG d’un certifi cat d’organisme collecteur, n’est ni fi xé, ni même envisagé.

Qu’en est-il de l’échange blé farine pain ?

Ce dernier est abrogé depuis juillet 2006, par ordonnance en bonne et due forme, mais les pouvoirs publics n’ont encore rien communiqué ; cette absence de circularisation semble avoir suscité la résistance, ça et là, d’irréductibles meuniers gaulois. A première analyse la mouture à façon (le meunier moud le blé qui lui est apporté et restitue un pourcentage de la mouture et garde le reste pour payer son travail), déjà sous tolérance, et dans l’oubli depuis de nombreuses décennies, ne semble pas fi gurer dans l’abrogation ; en conséquence, à ce jour elle doit être toujours légale.

Comment acquérir un contingent ? Mon moulin a eu un contingent, comment le savoir ? Comment le réactiver ? Sans contingent, puis-je racheter des droits etc.… ?

Un moulin sans contingent ou l’ayant vendu, ne peut en aucun cas en acquérir un par rachat. La règle est de prouver que le moulin avait un contingent en 1936 ; il peut alors le réactiver avant décembre 2008, grâce à la tolérance qu’induit le changement de système. De plus, la loi des 3 ans (« un moulin qui n’a pas écrasé depuis 3 ans et plus, perd ses droits ») est rendue caduque jusqu’à la même date, décembre 2008. En conséquence un moulin avec son contingent non utilisé depuis plus de 3 ans, s’il produit de la farine en 2008, en remplissant toutes les obligations sus citées retrouve tous ses droits. Mais attention : lorsque le décret sera paru, la dérogation n’équivaudra en aucune façon à un contingent ou à des droits de mouture. Dépasser le quota sera irréalisable et aucun rachat ou location de droit envisageable. Bien sûr, à l’inverse, la vente ou la location de
son excédent de quota non utilisé sera impossible. Enfi n et pour conclure, la profession sera très vigilante à ce que nous n’ayons pas d’accords de prix entre nous, pour ne pas mettre les meuniers en faute par rapport à la concurrence et aux prix. Il nous sera fortement déconseillé de vendre en dessous du prix moyen du marché et à l’inverse les prix prohibitifs non justifi és seront également sous très haute surveillance, pour éviter tout discrédit.

Voilà ce premier état des lieux. On voit que tout ceci est bien compliqué et qu’il est de notre devoir d’oeuvrer pour que notre rôle de préservation d’un patrimoine soit reconnu et aidé.
La première des aides serait un aménagement du système sus cité, sinon il nous sera diffi cile de « rendre vivant nos moulins ».

cont2
Au moulin de St Sulpice sur Lèze (Haute-Garonne) – photo M. Sicard

Pour arriver à nos fi ns voici le plan d’action que j’ai proposé à notre conseil d’administration, sitôt le décret paru il nous faut :
• Convaincre les pouvoirs publics du bien fondé de notre démarche et de son impact sur l’industrie touristique.
• Convaincre les industriels de l’intérêt qu’ils ont à nous aider pour affi rmer leur notoriété.

Pour ce faire :
1ère piste : Partenariat avec les industriels pour trouver un arrangement qui nous permettra de moudre sous leur bienveillante couverture, sous forme de soustraitance, mais en intégrant l’idée du mécénat. A creuser !
2ème piste : Obtenir un aménagement des règles, sur la base du seuil minimum d’écrasement, nous permettant une commercialisation simplifi ée de notre micro production. En parallèle il nous faudra négocier notre appartenance à l’ANMF, et peut-être, envisager une cotisation forfaitaire .

Il restera alors à accomplir un certain nombre de démarches visant au classement de notre production de farine en dehors des normes actuelles (par exemple : farine issue d’une mouture par meules de pierres suivant la
méthode dite à la grosse).
L’idéal serait que ce produit, nouveau mais historique, bénéfi cie d’un allégement des taxes et des déclarations, ainsi que d’un étiquetage simplifi é. Une action pour une simplifi cation de notre approvisionnement en blé sera également nécessaire.

Je suis personnellement convaincu de notre importance pour la sauvegarde de notre patrimoine meunier ; notre but doit être d’oeuvrer pour une meilleure reconnaissance de nos actions éducatives, qui doivent être aidées car elles sont d’utilité publique. Mon activité meunière industrielle antérieure et mon expérience de reconversion dans mon moulin de la Pauze depuis janvier 2004, m’autorise à vous dire que la tâche sera rude,
mais elle mérite d’être entreprise pour nos moulins et pour que ceux qui nous suivront puissent les approcher autrement que virtuellement.

Alain Mazeau – Article paru dans le Monde des Moulins – N°23 – janvier 2008

Catégories : Législation

0 commentaire

Laisser un commentaire

Avatar placeholder

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *