Le site des Moulins de France
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Moulins à eau

L’Aube possède un réseau hydrographique important qui se prête très bien à l’installation et au fonctionnement des moulins à eau.
Les moulins à eau sont connus depuis l’antiquité et il y en avait beaucoup dans l’Aube. Le recensement de 1809 en indique 414 et celui de 1874 en donne 445. En 1907, 108 étaient encore en activité. Actuellement, plusieurs produisent de l’électricité. Les moulins à grain et à huile d’Étourvy et du Breuil, à Chessy-les-Prés, se visitent et fonctionnent occasionnellement.

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Moulin de Cléry, sur la Seine, en 1906. Il ne reste plus rien actuellement. Carte postale

Raymond Tomasson1 cite des moulins hydrauliques sur la Seine, à Chappes et à Troyes, dès le VIIIe siècle. En 1338, Troyes est une des premières villes de France à accueillir un moulin à papier2. Cette industrie y sera prospère pendant plusieurs siècles pour disparaître seulement au XXe siècle !

Moulins à vent

Les moulins à vent ont toujours été moins nombreux : 97 pour le recensement de 1809.
La première mention de ce type de moulin est signalée par Raymond Tomasson dans un cartulaire de l’Hôtel-Dieu-le-Comte à Troyes, daté du 25 avril 1202, concernant la construction d’un moulin à vent à Nuisement.
C’est certainement au XVIe siècle qu’on en construisit le plus et, entre le XVIIe et le
XIXe siècle, Alphonse Roserot3 en recense 255 !

Spécificité de l’Aube

Puis, dans la seconde moitié du XIXe siècle, avec l’introduction des cylindres pour faire de la farine, la mouture industrielle se développe, quelques minoteries prennent de l’importance (les Grands Moulins de Nogent-sur-Seine4) au détriment des petits moulins qui périclitent.
Les moulins à eau résistent mieux que les moulins à vent car leur champ d’application est plus varié et la bonneterie qui se développe, notamment dans l’agglomération troyenne, les utilise pour ses filatures.

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Moulin d’Arcis-sur-Aube. Incendie du vieux moulin à farine, le 5 septembre 1910. Carte postale

L’arrivée du chemin de fer, avec son maillage important dans les campagnes, favorise les échanges : il n’y a plus, comme jadis, le besoin impératif de vivre en autarcie.
Dans les zones d’élevage, quelques moulins à vent fournissent encore la nourriture pour les animaux, puis s’arrêtent à la fin du
XIXe siècle.
L’Aube a une histoire particulière au
XIXe siècle : à partir de 1830, la campagne se dépeuple pro-gressivement au profit de l’agglomération troyenne et de quelques grands centres bonnetiers comme Arcis et Romilly5. Cette importante migration de la population change la donne : les besoins à la campagne ne sont plus les mêmes et les petits artisans, qui n’ont plus assez de travail, vont aussi en ville travailler pour la bonneterie !
Ces conditions particulières vont sceller le sort des moulins à vent : devenus inutiles, ils sont abandonnés et tombent en ruine. En 1900, il n’y en a pratiquement plus (moins de cinq certainement).
Puis leur souvenir se perd, ils ne font plus partie de la mémoire collective…

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Moulin à vent d’Origny-le-Sec. Il a brûlé en 1897. Carte postale

Patrimoine historique et culturel de l’Aube

Le département de l’Aube possède deux grandes richesses patrimoniales :

  1. Une abondante statuaire religieuse en bois ou pierre, où le XVIe siècle est particulièrement bien représenté.
  2. 9000 m² de vitraux du XIIe au XXe siècle, la plupart religieux, répartis dans environ 200 églises avec aussi quelques vitraux civils. Troyes entretient une longue tradition verrière depuis le Moyen Âge avec de grandes dynasties de maîtres verriers. Il y a encore actuellement deux établissements de création/restauration de vitraux.

Les instances départementales se mobilisent pour sauver, restaurer et mettre en valeur cet important patrimoine mondialement connu qui attire de nombreux visiteurs, au détriment du reste…

Qu’y a-t-il d’autre ?

  • Il reste très peu de châteaux : la plupart sont privés et ne se visitent pas6.
  • Les églises bâties en calcaire sont intéressantes, et grâce à l’initiative d’un particulier7 qui a lancé, il y a quelques années, le mouvement
  • « un jour, une église », beaucoup sont maintenant visitables les mois d’été dans le cadre d’un parcours organisé (visites gratuites avec guide bénévole et dépliants distribués). Le succès est tel que la Côte-d’Or a souhaité se rattacher au mouvement.
  • Les lavoirs : beaucoup sont maintenant restaurés grâce aux municipalités, avec l’aide de bénévoles. Aucune mise en valeur particulière.
  • Les croix de pays : une association, qui existe depuis une quinzaine d’années, essaie de les restaurer, mais reste très discrète…

Les moulins

Il ne reste plus un seul moulin à vent depuis les années 1910 pour le dernier.
Beaucoup de moulins à eau sont dans un état de délabrement avancé. Quelques-uns sont restaurés et servent d’habitation. Un ou deux fonctionnent occasionnellement.
La ville de Troyes a acheté ces dernières années8 les anciens Moulins de la Rave et Notre-Dame, un ensemble de 20 hectares dans la ville, avec 3 hectares bâtis. Le parc est progressivement aménagé, la maison bourgeoise du XIXe siècle doit être restaurée, mais rien n’est fait pour les moulins qui tombent en ruine, avec des toitures qui prennent l’eau et des arbres qui poussent sur les murs… En novembre 2016, un bâtiment annexe a été incendié. Il est évident que ces moulins ne sont pas une priorité pour la ville de Troyes, malgré l’intérêt historique lié au passé de la ville.

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Ramerupt : Coopérative meunière. Le moulin à eau a brûlé en 1917. Carte postale

Deux Aubois9 ont essayé d’acheter plusieurs moulins à eau qui produisaient de l’électricité, en faisant croire aux propriétaires qu’ils allaient restaurer les anciens moulins. Ils ont acquis ainsi les moulins à eau de Bourguignons et Bar-sur-Seine, exploitent les centrales électriques qui sont rentables et laissent les moulins se détériorer dans l’indifférence générale.

Le Moulin de Dosches

C’est dans ce contexte régional peu ouvert sur la préservation des moulins qu’arrive Erwin Schriever, au tournant du XXIe siècle, avec son idée de construire un moulin à vent identique à ceux qui existaient jadis dans l’Aube. Après bien des difficultés à surmonter et quelques aides financières au début, le moulin et son site aménagé fonctionnent maintenant de manière autonome.

Pour le Moulin à vent de Dosches, voir aussi le MdM n°33 p 27 – n°38 p 17 –
n° 39 p 14 – n° 61 p 14 et ce n°64 p 5

1. Raymond Tomasson, 1918-2016, historien archéologue : Des origines de la mouture aux moulins hydrauliques et à vent dans l’Aube, in Mémoires de la Société académique de l’Aube, T. 139, 2015, pages 371 à 381.
2. Voir la très complète étude de Louis Le Clerc (1835-1932) Le Papier, recherches et notes pour servir à l’histoire du papier principalement à Troyes et aux environs depuis le XIVe siècle, 1926.
3. Alphonse Roserot (1842-1932) : Dictionnaire historique de l’Aube, publication posthume.
4. Actuellement propriété du Groupe Soufflet.
5. Lucien Lagoguey, Essai statistique sur la dépopulation des campagnes auboises in Mémoires de la Société académique de l’Aube, an-née 1917.
6. Sauf celui de La Motte Tilly, malheureusement situé en marge du département.
7. José Cotel, qui s’appuie sur les offices de tourisme de Bar-sur-Seine et Essoyes.
8. En plusieurs lots à des propriétaires différents.
9. Les frères Prunier.

Catherine Robinet,
membre résidant de la Société académique de l’Aube – Association des Moulins à Vent Champenois

Paru dans Le Monde des Moulins N°64 – avril 2018

Catégories : Histoire

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