Le site des Moulins de France
ArabicBasqueBelarusianBulgarianCatalanChinese (Simplified)CzechDanishDutchEnglishFinnishFrenchGermanGreekHebrewHungarianItalianJapaneseLithuanianNorwegianPersianPolishPortugueseRomanianRussianSpanishSwedishTurkishUkrainian

Contexte historique
Au sortir de la seconde guerre mondiale, on a besoin de nourrir beaucoup de monde avec moins de main-d’œuvre (pour compenser les morts). L’industrialisation répond à ce besoin. On cherche à produire plus et plus vite. Dans le domaine des blés, on sélectionne des blés dont les glutens résistent au battage mécanique rapide de l’industrie. Le goût et la texture de la farine ne sont plus des critères, car les additifs permettent de les compenser. Seule compte la résistance des glutens qui permettent de retenir le gaz carbonique généré par la levure ou le levain ; la pâte à pain gonfle plus, les pains sont plus aérés, la mie est moins dense.
Aujourd’hui, l’hypothèse des paysans-boulangers cultivant des variétés anciennes (aux glutens fragiles) est que ces nouveaux glutens sont si résistants que de plus en plus d’estomacs ont du mal à les digérer : ces personnes sont dites intolérantes à « ces glutens technologiques ».

Problématique du paysan
Le choix des variétés de blé tendre proposées aujourd’hui aux paysans est très restreint (quelques dizaines, à comparer aux quelques centaines de variétés anciennes), et adapté à des terroirs riches qui n’existent que dans de rares régions. Les variétés anciennes offrent une telle diversité que l’on a toujours le choix entre plusieurs variétés à adapter à son propre terroir. De plus, une culture en mélange offre une sécurité vis à vis des maladies et des ravageurs, car une variété sensible sera statistiquement entourée d’épis plus résistants, qui limiteront la propagation de l’épidémie.

Problématique du boulanger
Je laisse de côté le boulanger qui hydrate une poudre, appelée « mix », à base de farine (pour combien de temps encore…) et d’une centaine d’additifs disponibles (levures, arômes, émulsifiants, gélifiants et autres molécules que seul un »Nobel de chimie » peut comprendre).
Mais si le boulanger considère que le pain est constitué de farine, d’eau et de sel, il a un choix énorme de goûts, textures, etc… parmi les variétés et les terroirs disponibles… pour peu que ces variétés anciennes soient toujours proposées par les paysans qui les font moudre sur des petits moulins comme les nôtres, seuls encore capables de traiter les petits volumes ainsi générés.
Proposition du meunier ? Sortir les variétés anciennes de blé tendre du conservatoire
Certains paysans recommencent à cultiver ces variétés. Ce sont les héros de notre époque, car ils doivent commencer par multiplier pendant plusieurs années « les quelques graines » de la variété afin de vérifier son adaptation au terroir et ses caractéristiques agronomiques et boulangères. Ce travail est gigantesque : il faut semer, récolter, caractériser, trier et stocker chaque variété séparément. Et la re-semer avant qu’elle perde sa capacité germinative.
Nous, utilisateurs de petits moulins, ne pourrions-nous pas devenir chacun le gardien (la tâche peut être techniquement sous-traitée à un paysan, une association, ou un particulier) d’au moins une variété adaptée au terroir alentour et que nous cultiverions sur une surface suffisante (¼ d’hectare) pour pouvoir faire des essais directement sans passer par une laborieuse multiplication. Par la création d’une base de données regroupant tous ces gardiens, quiconque voulant faire un essai (adaptation d’une variété sur un autre terroir, mélange de différentes variétés, etc.) aurait à sa disposition un produit directement utilisable qui pourrait permettre un essai avec un résultat dans l’année.
Le produit à stocker (quelques centaines de kilos) est le blé, mais le produit utilisable pour les essais du boulanger est la farine. Nous sommes le lien entre ces deux produits et c’est à ce titre que je pense que nous sommes les mieux placés pour proposer ce service.

1116-zoom pologne

Moulin en Pologne dans un champ de blé – Photo A. Eyquem

Procédure
1. chercher dans le catalogue Vilmorin quelques variétés anciennes susceptibles d’être adaptées au terroir et/ou y ayant déjà été cultivées
2. demander les variétés au conservatoire de l’INRA à Clermont-Ferrand
3. semer les 100 graines reçues (¼ m²)
4. caractériser la variété sur les critères agronomiques (vérification des informations données par le catalogue Vilmorin)
5. récolter, re-semer (multiplication par 10 chaque année si tout va bien) jusqu’à obtenir une quantité susceptible d’être transformée en farine pour faire quelques pains (environ 5-6 ans)
6. caractériser la variété sur les critères organoleptiques
7. conservation d’une quantité suffisante de grains pour pouvoir la proposer immédiatement à toute personne voulant faire des essais. Il est à noter que la variété va s’adapter à son environnement (terrain, météo, etc). Il est vain et inutile de vouloir conserver la variété « pure et originale »: le vivant s’adapte à son environnement, cela est ainsi. L’essentiel est de conserver une variété avec des caractéristiques particulières et connues, immédiatement disponible pour essai.

Sébastien Collin.
Auto-entrepreneur meunier du Moulin de la Garenne
à Pannecé (Loire Atlantique)

Paru dans le Monde des Moulins n°59 – Janvier 2017

Catégories : Histoire

1 commentaire

JRJ · 21 août 2023 à 15 h 23 min

que font ils de nos bonne veillent semences !

Laisser un commentaire

Avatar placeholder

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *