Une sixième roue vient d’être installée sur un moulin de l’Erve. Il s’agit du Moulin de Graslon, après ceux de Thévalles à Chemere-le-Roi, de Go à Saint-Pierre-sur-Erve, du Grand Moulin, du Petit-Gohard et du Pont-Neuf à Sainte- Suzanne.
Le Moulin de Graslon – Cliché Mme et M. A.Bateup
M. et Mme Bateup, adhérents de l’Association des Amis des Moulins de la Mayenne (AAMM), sont propriétaires du Moulin de Graslon à Chammes. Depuis septembre 2016, ils sont installés en France. Le moulin qu’ils possèdent à Chammes a déjà fait l’objet de nombreuses restaurations, couronnées dernièrement par l’installation d’une roue à aubes réalisée par Loïc Favris (Couverture – Charpente, à Vaiges).
La roue du Moulin de Graslon – Cliché Mme et M. A.Bateup
Le Moulin de Graslon retrouve ainsi une seconde vie. Revenons sur l’historique de ce moulin dont les mentions remontent au XVIIIe siècle.
Construction du Moulin de Graslon au début du XVIIIe siècle
Il est rare qu’un texte mentionne la date précise de construction d’un moulin. On peut cependant estimer cette date à partir de documents d’archives. La cartographie nous donne, pour le Moulin de Graslon, une première indication avec la carte de Jaillot de 1706 où il ne figure pas. Un deuxième indice provient des recherches effectuées aux Archives Départementales de la Mayenne : on observe qu’il n’existe aucun document antérieur à un bail du 15 août 1740 (ADM 2 C 1031). Le Moulin de Graslon aurait donc été construit entre 1706 et 1740.
Situation et caractéristiques du moulin
En 1862, 50 usines sont établies sur l’Erve, dont 44 moulins à blé, 5 moulins à tan, et une forge. À Chammes, à la même époque, l’Erve actionne les forges de Moncor, le moulin à tan du Bourg-à-l’Abbesse et cinq moulins à blé : Graslon, le Grand Moulin, le Moulin des Forges, le Moulin de Bergère et celui du Noyer. Ces moulins se font une rude concurrence, amplifiée par la proximité de Sainte-Suzanne où se trouvent de nombreux moulins.
Règlement du Moulin de Grâlon appartenant à M. François Houdayer. Extrait du plan parcellaire dressé par l’ingénieur ordinaire Dupuy, 26 juillet 1859 – Archives de Laval (S 574).
Le Moulin de Graslon est situé sur une dérivation de l’Erve. Selon le carnet de patente de 1860, le cours d’eau ne donne pas de chômage. La force motrice du moulin est de 8 à 9 chevaux. Il dispose d’une chute d’eau de 1,30 m et un débit de
220 litres par seconde.
Notons que ce moulin a été règlementé par un arrêté du 10 février 1860.
Grâce aux carnets de patentes des établissements industriels (ADM P 138) conservés aux Archives Départementales, nous savons que le Moulin de Graslon a été reconstruit entre 1852 et 1860 par le meunier Francois Houdayer qui l’exploite.
En 1852, l’usine, mue par une roue à palettes qui a une force de 3 à 4 chevaux, ne fait tourner qu’une paire de meules. Après les transformations apportées par François Houdayer, le moulin est équipé en 1860 d’une roue à aubes courbes développant une force motrice de 8 à 9 chevaux. Le système anglais, caractérisé par les engrenages en fonte, équipe désormais l’usine dotée de trois paires de meules. L’amélioration est sensible, la force motrice étant multipliée par deux et le nombre de paires de meules multiplié par trois.
Le Moulin de Graslon sur une carte postale ancienne – Archives de Laval
Dans le bâtiment du moulin, les engrenages et bluteries sont installés au rez-de-chaussée ; les trois paires de meules, au premier étage et le nettoyage du grain au-dessus. Le logement du meunier se trouve dans un bâtiment séparé.
Le moulin ne connaîtra pas d’autre amélioration, telle que l’installation d’une turbine ou d’une machine à vapeur, qui lui aurait permis de prendre un ascendant sur les autres moulins de la région. Sa clientèle limitée ne le lui permettait sans doute pas.
Cependant, lors de l’établissement du contingentement en 1936, Alphonse Richefeu, son meunier, déclare disposer d’un modeste moteur d’appoint au gasoil de 10 à 12 chevaux.
L’Écho de la Mayenne, 15 mai 1864 – Archives de Laval (1 Pe 34/21)
En tout état de cause, le Moulin de Graslon reste un petit moulin, dit « moulin à façon » dans la mesure où son activité se limite à la mouture des céréales livrées par les producteurs qui les remportent après écrasement. Il a conservé son caractère artisanal, n’employant aucune main d’oeuvre salariée permanente. Sa capacité d’écrasement n’excède pas 20 quintaux par jour. Le moulin produit de la farine de blé jusqu’en 1940, puis écrase des céréales secondaires jusqu’à sa cessation d’activité dans les années 1960.
Les meuniers de Graslon
Nous connaissons les meuniers de Graslon notamment grâce aux actes notariés et aux recensements de population répertoriés depuis 1836.
Les meuniers de Graslon de 1740 à 1936 – Archives de Laval
Le Moulin de Graslon – Cliché Mme AC. Boever
Nous espérons continuer la restauration du moulin dans les années à venir : sécuriser les deux étages, remettre les fenêtres, peut-être produire de l’électricité, etc.
Nous remercions M. Houdeau, de l’AAMM, pour les informations historiques du moulin utilisées dans cet article.
Geneviève et Alain Bateup
Propriétaires du Moulin de Graslon
https://www.facebook.com/MoulinDeGraslon/
Paru dans Le Monde des Moulins n°62 – Octobre 2017
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