Le site des Moulins de France
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En 2015, l’Association Des Amis des Moulins de Lot-et-Garonne (ADAM-LG) a entamé un inventaire aussi exhaustif que possible des moulins de Lot-et-Garonne.

 

Un premier inventaire avait été réalisé en 1997 avec l’aide du Conseil Général (voir site internet : www.CG47.org/webcg47/site_moulin/accueil.htm) ; mais cet inventaire des moulins « encore existants ou en ruines » s’est révélé être assez partiel, avec de nombreux moulins oubliés.

 

La numérisation des plans anciens par les Archives départementales de Lot-et-Garonne (Carte de Belleyme, Carte de Cassini, Cadastres Napoléoniens, Cartes cantonales de la fin du 19e siècle…) nous fournit des sources d’informations importantes sur l’existence des moulins du Lot-et-Garonne. De plus, ces informations sont devenues facilement accessibles grâce à Internet, consultables à volonté, chez-soi, à toute heure du jour et de la nuit…

 

Complétées par des recherches sur site, par celles qui ont été réalisées en 1997 avec le Conseil Général, et par quelques recherches historiques, elles ont permis d’inventorier et de localiser (coordonnées GPS) 1365 moulins (existants ou ayant existé) dont :

  • 834 moulins à eau
  • 530 moulins à vent
  • un seul moulin à force animale.

Monuments Historiques

Six moulins ou éléments de moulins de Lot-et-Garonne sont inscrits ou classés comme  Monuments Historiques : Moulin des Tours de Barbaste sur la Gelise (photo 1), Vieux pont (barrage) du Moulin de  la Sauvetat-du-Dropt sur le Dropt, Moulin de Lustrac à Trentels sur le Lot (photo 2),  la forge du Moulinet à Saint-Front-sur-Lemance sur la Lemance, château et moulin fortifié de Ferrussac, étang et digue du Moulin de la Forge de  Blanquefort-sur-Briolance.

1-Moulin des Tours de Barbaste sur la Gélise – Monument historique – Photo JL-Milon, président ADAM-LG

2- Moulin de Lustrac sur le Lot – Monument historique – Photo H.Degraeve

Quatre ponts barrages sont encore existants (photo 3)  et de nombreux moulins sont inscrits sur des sites classés.

3- Pont-Barrage du moulin du Fréchou – Commune du Fréchou – Photo H.Degraeve

 

Moulins à eau de Lot-et-Garonne

 834 moulins à eau ont été recensés et localisés fin 2020.

Comparatif avec d’autres inventaires

En 1997, un inventaire réalisé par ADAM-LG, avec le Conseil Général, avait identifié 405 moulins à eau.

L’état statistique de 1899 avait identifié
534 moulins à eau et 1077 paires de meules hors rivières domaniales (Lot et Dropt navigables, Canal du Midi) ; soit un total de
570 moulins à farine, dont 137 inactifs (JF. Samazeuilh : Dictionnaire géographique, historique et archéologique de l’arrondissement de Nérac, publié en 1881).

L’inventaire de 1809 sur les moulins à farine avait recensé 902 roues hydrauliques (dont
44 verticales et 858 horizontales) en activité.

 

Histoire

Les moulins à eau, en Lot-et-Garonne, remontent  à des temps immémoriaux.

Au 13e siècle, ils étaient déjà très nombreux. On a même pu démontrer, sur la rivière du Lot ainsi que sur la Baïse, qu’ils étaient plus nombreux au 13e siècle qu’en 1789 !

Les moulins à eau du Moyen Âge étaient souvent fortifiés et utilisaient des roues verticales.

À partir de la Renaissance, jusqu’à la Révolution, de nouveaux moulins apparaissent, et la plupart des moulins déjà existants sont reconstruits, abandonnant les fortifications et s’équipant de roues horizontales pour la mouture du blé.

Le célèbre Moulin des Tours de Barbaste (photo 1), qui a conservé fortifications et roues verticales, fait figure d’exception.

L’abolition de la féodalité, en 1791, n’entraîna pas une hausse significative du nombre de moulins à eau. Les révolutionnaires demandèrent d’en faire un inventaire afin de pallier le manque de farine. L’inspecteur révolutionnaire désigné en Lot-et-Garonne ne facilita pas l’installation de nouveaux moulins ; au contraire, il fit réduire la hauteur de nombreux barrages (et, parfois même, il fit détruire des moulins), car il estimait que les barrages entraînaient d’importantes inondations de terres cultivées, et une perte de revenus pour les paysans révolutionnaires.

La tendance, depuis le 13e siècle, a été un renforcement progressif des moulins existants, et une augmentation de leur puissance par rehausse des barrages, augmentation du nombre ou de la taille des roues.

Les moulins à eau, pour faire face à la chute des cours de la farine, se sont diversifiés : filatures, scieries, papeteries, foulons, usines à glace, usines à liège, etc. Certains ont subi de nombreuses modifications successives au cours du 19e siècle, comme, par exemple, le Moulin de Clarens à Casteljaloux : jadis moulin à farine, puis moulin à papier en 1791, puis verrerie vers 1800, puis de nouveau moulin à blé, puis papeterie de papier à paille en 1860 !  Nos moulins ont souvent eu plusieurs vies !

Si le recensement a beaucoup progressé, il n’est pas exhaustif. Nous n’avons que peu d’informations sur l’histoire des moulins inventoriés. Une dizaine de moulins recensés dans l’inventaire de 1899 n’ont toujours pas pu être localisés. De nombreux moulins cités dans des textes anciens n’ont pas pu être identifiés. En effet, les moulins et ruisseaux ont souvent changé de nom au fil des siècles, ce qui rend leur identification difficile !

Moulins à vent de Lot-et-Garonne

Fin 2020, l’inventaire totalise 530 moulins à vent existants ou ayant existé, localisés avec coordonnées GPS.

L’inventaire réalisé en 1997 avec le Conseil Général totalisait 130 moulins à vent (existants ou à l’état de ruine).

L’inventaire est désormais cohérent avec les anciennes statistiques :

  • 408 moulins à vent en activité ont été recensés en 1809 pour la production de farine
  • 371 moulins ont été recensés par Talives en 1862
  • 330 moulins ont été recensés par Talives en 1880.

Certains moulins disparurent avant 1809, d’autres ont été construits après 1809. La vie d’un moulin à vent est souvent courte.
Tempêtes, orages, incendies… en ont détruit beaucoup. Certaines tours de moulin ont été converties en tours pour le télégraphe Chappe, d’autres comme support de statues monumentales !

 

Moulins à vent médiévaux

Des textes anciens démontrent qu’il existait des moulins à vent dès le Moyen Âge en Lot-et-Garonne :

  • Les écrits sur la guerre de Saint-Sardos signalent l’existence d’un moulin à vent à Montpezat en 1324.
  • Les « Coutumes de Marmande » attestent l’existence de moulins à vent sur les coteaux autour de Marmande avant 1340, etc.

Cependant, nous n’avons retrouvé aucun vestige de ces moulins médiévaux et nous ne savons rien sur ces moulins ancestraux : étaient-ils en bois, en colombages ou déjà en pierre de taille ? S’agissait-il de moulins pivots ou de moulins tours ? Quelle était la taille de ces moulins ?

 

De la Renaissance à la Révolution française

Les plus vieux moulins (non disparus) datent de la Renaissance (photo 4).

Le moulin à vent de Tandou (ou Colombier) à Montastruc date du 16e siècle (source Mérimée). Il est légèrement conique. C’est le seul moulin (connu) à ne pas être parfaitement droit en Lot-et-Garonne. Les moulins coniques sont pourtant nombreux en Occitanie voisine.

4- Moulin de Baret – Commune de Madaillan – Coll.photothèque ADAM-LG – CG47

5- Moulin de Gorry – Commune de Grateloup-Saint-Gayrand – Photo H.Degraeve

Le moulin à vent de Lot-et-Garonne est relativement standard : tour cylindrique droite, toit tournant,  deux portes diamétralement opposées, deux étages, une paire de meules au
deuxième étage… (photo 5)

Cependant, il n’y a pas deux moulins identiques et chacun a ses particularités : diamètre intérieur, épaisseur des murs, position et taille des fenêtres, forme de la toiture, parfois  présence d’une salle carrée, avec ou sans butte artificielle, avec ou sans cave, avec ou sans tunnel…

Moulins à vent du 19e siècle 

De la Révolution française à 1830, les constructions de moulins à vent restent nombreuses ; puis la chute des cours de la farine va, lentement mais sûrement, faire décliner cette activité au 19e siècle.

Des modifications vont être apportées aux moulins à vent pour en améliorer le fonctionnement et essayer de  faire perdurer leur activité.

La construction d’une cave permet d’installer la meule (ou deux paires de meules) au rez-de-chaussée, évitant une pénible montée des sacs de grains au deuxième étage, facilitant l’installation (et le remplacement éventuel) des meules. Rares avant 1800, les moulins à vent avec cave sont devenus fréquents dans les constructions ou reconstructions de ceux-ci après 1930.

6- Moulin Capet de Montpezat – Canton de Pressac – Photo H.Degraeve

Preuve de cet engouement pour les moulins à vent avec cave, plusieurs d’entre eux ont été démolis jusqu’aux fondations pour permettre la reconstruction d’un moulin à vent avec cave : Gibra, commune de Gontaud, Coulaqué, commune du Saumont, Capet à Montpezat (photo 6), etc…

Un moulin à vent, au moins, possède une cave sans butte artificielle (cave creusée) : Moulin de Bel Air à Prayssas.

22 moulins à vent avec cave ont été dénombrés pour l’instant… mais la liste n’est pas exhaustive !

Certains moulins à vent essaient de se diversifier et s’équipent de deux paires de meules : l’une pour la farine de blé, l’autre pour le maïs ou toute autre mouture pour l’alimentation animale.

En 1880, l’historien J.-F. Samazeuilh2 écrit qu’il ne reste, sur l’arrondissement de Nérac, que 12 moulins à vent encore en activité dont trois (soit 25 %) possèdent deux paires de meules !

Le Moulin de Cantecoucut (photo 7) est un bel exemple de ce type de moulin.

7- Moulin de Cantecoucut – Commune de Montesquieu – Coll.photothèque ADAM-LG – CG47

 

Implantations des moulins à vent

Les moulins à vent sont inégalement répartis sur le département.  Le Nord-Ouest du département en concentre plus de la moitié.

La vallée de la Garonne est moyennement venteuse, mais a l’avantage d’avoir d’importants axes de transports. De nombreux moulins  à vent s’y sont installés (18 recensés).

La lecture des cartes anciennes a permis d’en identifier un grand nombre. Cependant, la majorité de ces moulins ont aujourd’hui disparu.

Recensement des moulins à manège

Les moulins à manège étaient encore nombreux en activité au 19e siècle comme en attestent certains écrits. Ils ne figurent sur aucune carte contrairement aux moulins à vent et aux moulins à eau. Le recensement et la localisation de ces moulins à manège, presque tous disparus, est donc difficile.

Les moulins à manège produisaient essentiellement de l’huile mais il existait également en Lot-et-Garonne des scieries2 utilisant des moulins à manège. Les faïenceries de Villeneuve-sur-Lot utilisaient en 18392 de grands manèges à chevaux pour broyer.

La suite de cet article fait le point de nos connaissances sur les moulins à huile en Lot-et-Garonne.

 

Pressoirs et moulins à huile en Lot-et-Garonne

L’huile était produite depuis l’antiquité à l’aide de meules verticales broyant olives ou graines oléagineuses. Les graines broyées étaient parfois chauffées, puis pressées pour en extraire un maximum d’huile à l’aide de presses manuelles (à vis ou à levier).

Ces moulins étaient mus essentiellement par la force humaine ou animale.

La production d’huile était jadis importante car l’huile servait non seulement à l’alimentation mais également à l’éclairage grâce aux lampes à huile.

La lampe à huile était en effet le moyen d’éclairage le plus utilisé autrefois. Les bougies étaient onéreuses, réservées à la noblesse et au clergé ; les « chandelles » à base de graisse animale donnaient une faible lumière jaunâtre, et émettaient une fumée noirâtre et malodorante.

La bougie à base de stéarine (extraite de la graisse animale) et de cire ne fut inventée qu’en 1823 et se mit à concurrencer les lampes à huile à partir du milieu du 19e siècle. L’invention des lampes à pétrole fit disparaître les lampes à huile à la fin du 19e siècle.

Lin, chanvre (dont la graine est le chènevis), navette, oeillette, cameline… puis colza fournissaient les grains oléagineux.

Le colza, dont la production fut importée de Chine en Europe à la fin du 17e siècle, donnait la meilleure huile d’éclairage. Le colza connut une forte croissance de 1750 à 1850 puis périclita. Les variétés de colza de l’époque donnaient une mauvaise huile alimentaire et les tourteaux étaient impropres à la consommation animale !

Dénommés presseurs d’huile en Lot-et-Garonne (ref: registres paroissiaux, recensements), huiliers (encyclopédie de Diderot), tordeurs d’huile dans le Nord de la France, batteurs d’huile (dans certaines régions, on écrasait les grains avec des pilons…), beaucoup  d’artisans produisaient localement l’huile nécessaire à la population.

L’importation d’huiles étrangères (olive, arachide, palme…) et la concurrence des lampes à pétrole firent dégringoler cette production locale d’huile à la fin du 19e siècle.

L’historien JF. Samazeuilh1 nous signale l’existence de 11 huileries ou pressoirs à huile à manège en activité vers 1880 sur l’arrondissement de Nérac (un pressoir sur la commune de Casteljaloux, un pressoir sur la commune de Francescas, un pressoir sur la commune de Mezin, quatre pressoirs sur la commune de Moncrabeau, deux pressoirs sur la commune de Nérac, un pressoir sur la commune de Montagnac, un moulin à huile à manège sur la commune de Saint-Léon).

Avec 317 paires de meules à farine sur l’arrondissement, cela correspond donc à un pressoir à roue verticale pour 29 paires de meules à farine.

Ces huileries utilisaient des moulins à manège à un seul cylindre (meule verticale) et une presse.

En extrapolant aux quatre autres arrondissements, il y avait donc environ cinquante huileries à manège en activité dans le département de Lot-et-Garonne vers 1880.

Non inventorié par Samazeuilh, le moulin à sang de Saint-Laurent a conservé ses équipements (meule verticale).

8- Moulin à manège de Saint-Laurent, canton de Lavardac – Photo JL. Milon

Des moulins à eau produisant de l’huile étaient jadis rares. Seulement trois sont indiqués dans l’inventaire révolutionnaire de 1794, tous les trois installés sur la Lémance : pressoir de Pouget, pressoir du Moulin de Saint-Front, pressoir du Moulin de Sauveterre.

 

Les Archives départementales3 nous signalent l’existence d’un autre moulin à huile : le Moulin de Coupé (ou Cousseau) sur le Coupé à Villeneuve de Mezin, vendu comme bien d’émigré en l’an V du calendrier républicain.

Auguste Cassany-Mazet a inventorié cinq pressoirs à huile mus par l’eau en 1839 sur l’arrondissement de Villeneuve-sur-Lot : deux pressoirs à huile sur la Lède, deux pressoirs à huile sur la Lémance, un pressoir à huile sur le Dor.

L’inventaire des moulins à eau de 1899 nous signale l’existence de 8 huileries actionnées par la force motrice de l’eau :

  • Huilerie du Moulin de Fonsalade sur la Lémance
  • Huilerie du Moulin de Faurein sur la Lémance
  • Huilerie du Moulin de Thomas sur la Masse de Villeneuve
  • Huilerie du Moulin de Saint-Vite sur le Dor
  • Huilerie du Moulin de Cabirol sur la Lède
  • Huilerie du Moulin de Baraillé sur la Lède
  • Huilerie du Moulin de Scandaillac sur la Gardonne
  • Huilerie du Moulin de Lagante sur le Cluzelou

Bien que ne figurant pas sur l’inventaire de 1899 comme pressoir à huile, le Moulin de Bordes sur la Masse, de Prayssas, est le dernier moulin à eau (connu) en Lot-et-Garonne disposant encore d’un pressoir à huile. Une pierre verticale monobloc en calcaire, légèrement tronconique (diamètre extérieur 120 cm, diamètre intérieur 110 cm, épaisseur 45 cm) tournait sur un bâti de 183 cm de diamètre. L’entraînement se faisait par un rouet, un axe vertical et renvoi d’angle vers la meule.

9- Vestiges du moulin à huile de Bordes sur la Masse, canton de Prayssas – Photo Mme – M. Bouzerand

 

L’inventaire de 1899 nous signale également l’existence de trois pressoirs mécaniques mus par la force de l’eau : pressoir mécanique du moulin de Carnelat sur la Segone, pressoir mécanique du moulin de Calbel sur la Séoune, pressoir mécanique du moulin de Blanc sur le Bourbon.

 

Nous n’avons malheureusement pas plus de précisions sur ces « pressoirs mécaniques » : pressoirs à huile ?, à fruits ?, à raisins ? Avec quelle technologie ?

 

Au 20e siècle, les moulins à huile ont parfois continué  à fonctionner pour la production d’huile de noix. On les a alors dénommés « moulins à noix », alors que cette production était minoritaire jadis dans notre département.

 

Aucun moulin à vent produisant de l’huile n’a été inventorié dans le département du Lot et Garonne. Les moulins à vent à huile (dénommés « tordoirs » en Flandre) étaient pourtant nombreux en France jadis. Ainsi 474 moulins à vent produisant de l’huile ont été inventoriés en Nord-Pas-de-Calais en 1818 pour 1464 moulins à vent à farine !

 

Texte extrait d’un article publié dans «Le lien» n° 44  de février 2021, journal de l’Association des Amis des Moulins du Lot et Garonne)

Hendrik Degraeve
Association Des Amis des Moulins
de Lot-et-Garonne (ADAM-LG)

 

Catégories : Histoire

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