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Dans un article précédent, nous avons décrit comment s’est faite l’industrialisation puis ce qui peut se produire avec la diminution des réserves des énergies fossiles. Nous allons ci-dessous examiner la différence des prix de revient d’un labour réalisé à la main, avec cheval et d’un labour effectué avec un tracteur.
Certains chiffres utilisés sont naturellement contestables. Merci aux lecteurs qui m’en proposeront de plus précis.

Labourage manuel
Prenons l’exemple d’un homme qui actionne une machine à l’aide d’une manivelle de 0,35 m de longueur. On admettra qu’il exerce une force de 7 kilogramme-force, soit une force de 70 N (Newton) et qu’il peut faire un tour de manivelle en 2 secondes.
Il développe une puissance de 70 x 0,35 x 2 x 3,14 x 0,5 = 77 W (Watt) ou encore 0,1 ch (cheval-vapeur).
C’est également la puissance que développait un cultivateur du Moyen Âge qui retournait son champ avec une bêche et aussi ce qu’on mentionne usuellement dans la littérature contemporaine.
En travaillant une heure, il fournissait un travail de 77 x 3600 = 280 kJ (kilo-Joule).
Le labourage d’un champ par un ouvrier seul n’ayant pas trop de sens aujourd’hui, regardons l’intérêt présenté par les chevaux qui ne sont plus utilisés en France pour les travaux de labour depuis quelques années mais qui le sont encore dans certains pays en voie de développement.

Labourage avec un cheval
Un cheval équipé d’un collier d’épaule est capable d’exercer une force de 440 N* et à la vitesse de 0,90 m/s d’avoir une puissance voisine de 400 W. Il réalise alors un travail horaire de 400 x 3600 = 1,45 MJ (Méga-Joule) soit un
peu plus de cinq fois le travail d’un homme.
Un cheval revient aujourd’hui à environ 30 euros/jour et son conducteur 12 euros de l’heure. Dans sa journée de 8 heures, le laboureur du XVIIIème siècle était réputé avoir labouré, avec un cheval, un « journal »** d’environ 3400 m².
Si l’on considère que le palefrenier est payé 12 € de l’heure***, le prix de revient du labourage d’une surface d’un journal à l’aide d’un cheval est de : Paie du laboureur + Nourriture du cheval (8 x 12 €) + 30 € = 126 €/jour
et le prix de celui d’un hectare de 126 / 0,3400 = 370 €

Labourage avec un tracteur
Prenons l’exemple d’un tracteur de 100 ch DIN, capable de labourer 1 hectare à l’heure en consommant 22 litres de gas-oil à l’heure*.
Considérons que le conducteur du tracteur revient au même prix que le palefrenier soit 12€ de l’heure. On prend 15 €/heure pour l’amortissement du tracteur et 20 €/heure pour celui de la charrue. Le gas-oil est facturé à 0,60 € le litre.
Le prix de revient horaire du labourage motorisé d’un hectare est le suivant : Conducteur + tracteur + charrue + gas-oil : 12 + 15 + 20 + (22 x 0,60) = soit un peu plus de 60 € si l’on prend une marge pour l’entretien et les pneus.
On voit que le labourage, à l’aide d’un cheval, revient entre 5 et 6 fois plus cher que le labourage avec un tracteur. Pour que l’utilisation du cheval s’avère intéressante, il faudrait que le gas-oil soit acheté au prix X suivant : 370 = 12 + 15 + 20 + (22 x X) ou X = (370 – 12 – 15 – 20) / 22 = 14,68 €/l
Si l’on excepte la période de récession récente, 2008/2009, qui l’a fait redescendre, le prix d’un baril de 159 litres de pétrole, d’après certains experts, devrait se stabiliser autour de 100 dollars. Le litre de gas-oil raffi né serait alors d’environ 1 €. Le prix à la pompe, dépendant des taxes, ne devrait pas dépasser 2 €.
Il y a encore de la marge pour que le cheval redevienne le moteur journalier des agriculteurs… sauf si l’éponge/terre s’assèche plus vite que prévu. Quant au labour manuel, mieux vaut ne pas y penser.

Voiture à essence
Les lecteurs de cet article n’étant pas tous intéressés par l’utilisation d’un tracteur, nous allons comparer le travail de l’homme à celui du moteur à explosion qu’il connaît le mieux : celui de sa voiture ! Une voiture moyenne européenne moderne consomme 7 litres d’essence pour une puissance d’environ 80 ch.
Le travail horaire de cette voiture sera de : 80 x 735 x 3600 = 210 MJ
L’homme fournit un travail horaire de 280 kJ.
La consommation de 7 litres d’essence permet donc d’effectuer un travail équivalent à 210/0,280 = 750 fois celui d’un homme, soit l’équivalent de presque 100 jours de travail d’un homme (750/8 = 94).
Autrement dit, il y a dans 7 litres d’essence l’équivalent d’une centaine de jours de travail d’un homme. On a du mal à y croire. Où se trouve l’erreur ?

Voiture électrique
Examinons maintenant l’utilisation d’une voiture électrique qui est capable de parcourir 200 km avant que sa batterie ait besoin d’être rechargée.
Etant moins rapide et moins puissante que sa devancière à essence, on admettra qu’il lui faudra 3 heures pour parcourir ces 200 km avec une dépense horaire de 80 Joules, ce qui correspond à une puissance d’une trentaine de chevaux. Le travail total fourni vaut alors 30 x 735 x 3600 x 3 / 1000000 = 240 MJ
Si on admet que la batterie doive être rechargée en 20 heures, la puissance électrique nécessaire sera de : 240/ [20 + 3600] = 3,34 kW.
Pensez, dès aujourd’hui à installer le branchement adéquat dans votre garage.

Version pour meuniers
Si on admet que la batterie doive être rechargée en 20 heures, grâce à la roue de votre moulin, calculons la puissance de l’alternateur de la turbine de votre moulin.
Travail horaire : 240/20 = 12 MJ
soit une puissance de 12000 / 3600 = 3,34 kW ou encore 4,5 ch (cheval-vapeur)
C’est tout à fait possible de préparer dès aujourd’hui le branchement adéquat.

Je remercie Monsieur Jean-Yves Dupont, Professeur de sciences industrielles en CPGE à l’Université Paris Diderot. qui m’a aidé pour la réalisation de cet article, en particulier pour l’utilisation des unités normalisées.

* Les premières étapes du machinisme – Maurice DAUMAS PUF 1965
** Dictionnaire de l’ancienne langue française du IXème au XVème siècle – Frédéric Godefroy.
*** Index des prix et des normes agricoles 2006-2007 Daniel Teyssier – Lavoisier.

G.Gau – Article paru dans le Monde des Moulins – N°39 – janvier 2012

Catégories : Technique

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