Le moulin au milieu des vignes. Photo Herbert Bednarik.
Dans tous les pays, la géographie décide de l’emplacement des moulins à vent. Même en Autriche, pays couvert en majeure partie de montagnes où l’on trouve un grand nombre de moulins à eau, les quelques moulins à vent se situaient dans le nord du territoire. Parmi eux, deux ont survécu.
A Retz, petite ville historique à 80 km au nord de Vienne, il reste un de ces moulins à vent à tour tronconique. C’est ce moulin à farine qui est présenté ici.
Il a été construit en 1853, en pleine campagne au milieu d’une région de viticulture, pour remplacer un moulin pivot datant de 1772.
Conformément à la structure économique régionale il a servi comme petit moulin rustique. Il a moulu surtout du seigle pour le pain noir, nourriture typique de la région, ainsi que de l’orge pour le bétail.
La terre, dans les environs du moulin, est peu fertile, ce qui avait pour conséquence des revenus modestes pour le meunier.
Pour améliorer sa situation économique, le meunier s’occupait aussi de la vigne. De cette façon, les meuniersvignerons pouvaient subvenir, depuis six générations, aux besoins de la famille grâce à cette double source de revenus.
Le moulin à vent a fonctionné jusqu’en 1924, puis il fut protégé en tant que monument historique. Depuis cinquante ans, il est accessible au public. Récemment, après 85 ans d’inactivité, sa période de repos s’est terminée avec l’intervention d’une équipe d’experts hollandais. Grâce à une restauration à l’identique, le moulin a été totalement remis en service : les ailes tournent, les meules écrasent le grain avec la force naturelle du vent et les mécanismes d’autrefois.
Les responsables ont voulu mettre l’accent sur sa mise en valeur culturelle avec une utilisation modérée pour le tourisme.
Ils recherchent un amortissement suffi sant des dépenses de la restauration. L’exploitation touristique est une activité développée en commun par le propriétaire et la commune. Cette utilisation exige le renforcement des activités d’information, de formation et d’éducation pour que le moulin réponde aux besoins du XXIème siècle. Les relations publiques jouent un rôle important : il faut des informations sur le plan éducatif et pour les médias,
parce qu’après sa restauration authentique, le moulin est le seul représentant de ce genre en Autriche et dans les pays voisins.
Pour les activités touristiques, la mouture est limitée en raison du caractère historique du moulin : on vend le pain, fait avec la farine moulue au moulin, seulement le week-end. Le moulin à vent bénéfi cie d’un grand intérêt de la part du public, il est ouvert toute la semaine lorsqu’il fait beau temps. L’accès n’est possible que dans le cadre de visites guidées. En moyenne on compte 15 000 visiteurs par an. La visite guidée terminée, les visiteurs prennent plaisir à casser la croûte dans la vieille maison du meunier, aménagée en restaurant-bar à vin typique.
Le moulin et la maison du meunier. Photo d’Herbert Bednarik.
Le cabestan pour orienter la calotte. Photo Herbert Bednarik.
Quant à l’intérieur, l’ameublement, les instruments et les machines de mouture n’ont pas été touchés après la fermeture du moulin. Il est donc ainsi possible de visiter un moulin à vent typique de l’Europe centrale au milieu du XIXème siècle.
Une de ses caractéristiques est l’emploi du bois pour la majeure partie de l’installation : dans ce moulin, comme c’était le cas dans les autres anciens moulins en Autriche, les arbres, les roues dentées et les ailes étaient fabriqués en bois.
A l’extérieur, la calotte conique, revêtue de bardeaux en mélèze, a un petit balcon couvert. Elle peut être tournée au moyen d’un cabestan en chêne.
Les ailes symétriques sont couvertes de planches de peuplier amovibles dont le nombre doit être changé manuellement. Le moulin possède trois paires de meules dont une seule est reliée par transmission à un tamis cylindrique et à un élévateur à godets, appelé ici « tournant demi-artifi ciel ».
Quand, vers 1890, les appareils à cylindres et la force de la vapeur menaçaient les moulins rustiques à farine, les meuniers locaux trouvaient que cette solution revenait meilleur marché pour améliorer la productivité.
L’atelier avec ses vieux outils. Photo Herbert Bednarik.
Lorsque le moulin s’arrêta de moudre en 1924, le propriétaire se rendit compte de la valeur culturelle de son moulin et mit de coté ses outils. De cette façon, la plupart d’entre eux ont été préservés jusqu’à nos jours : toute la série des outils pour rhabiller les meules, l’atelier complet avec les outils pour travailler le bois, ainsi que les anciennes mesures à grains avec des marques de jauge datant de 1833.
Tous ces objets témoignent de la vie d’autrefois au moulin. Le livret de tournée où le meunier a inscrit les affaires journalières porte sur la période 1860- 1924.
Pendant la deuxième moitié du XIXème siècle, le meunier et ses clients ont écrit et gravé des chiffres et des lettres sur l’engrenage et les meubles. Ces écritures ont été répertoriées dans un livre où l’histoire du moulin est racontée.
Thérèse Bergmann
Article paru dans le Monde des Moulins – N°40 – avril 2012
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