Le site des Moulins de France
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Le moulin à vent de Montbrun-Lauragais daterait de 1680 comme peut le laisser supposer l’inscription gravée au dessus de sa porte d’entrée.
C’est un moulin typique du Lauragais, région située au sud-est de Toulouse, relativement bien pourvue en moulins à vent en raison de la présence de vents favorables et d’une terre propice à la culture des céréales.
Si l’histoire ancienne du moulin qui fi gure sur la carte des Cassini est assez mal connue dans les premiers siècles de son existence, on dispose par contre de quelques éléments concernant son évolution plus récente.
Tout d’abord, des traces d’un escalier dans la maçonnerie à l’intérieur du moulin font penser que le moulin possédait initialement une seule paire de meules située à l’étage, alors qu’il était équipé de deux paires de meules situées au rez de chaussée lorsqu’il a cessé son activité. Ce changement de confi guration est vraisemblablement intervenu au cours du XIXème siècle et avait certainement pour motivation la spécialisation des paires de meules : l’une pour moudre le blé, l’autre pour moudre le maïs. En effet, à cette époque dans le Lauragais, la production de maïs était importante et sa farine était utilisée pour la nourriture humaine sous forme du traditionnel « millas ». C’est probablement à l’occasion de cette modifi cation que les engrenages en bois ont été remplacés par des engrenages mixtes boisfonte : un pignon en fonte a pris la place de la traditionnelle lanterne, un hérisson en fonte équipé de dents en bois et couplé à deux pignons en fonte a permis l’entraînement des deux meules.

Le moulin a fonctionné avec cet équipement jusqu’à la première guerre mondiale avant d’être abandonné. Une photographie de 1924 laisse apparaître des ailes encore en bon état mais un toit qui commence à se dégrader, signe de sa désaffectation. Une autre photographie datée de 1946 le montre en fort mauvais état avec seulement une vergue portant quelques barreaux prêts à tomber.
Mais, dans les années 50, le moulin devait revivre, après avoir été remis en état de fonctionner au vent par le charpentier amoulageur Raymond Pastre, bien connu par ses interventions dans les moulins de la région. Cette réhabilitation fut rapidement suivie de l’installation d’un moteur électrique permettant d’entraîner les meules en l’absence de vent, tout en conservant les ailes en état, comme en témoigne une photographie de l’époque. Il continua ainsi à moudre jusqu’à son arrêt défi nitif en 1960. Dans les années qui suivirent, il tomba progressivement en ruine mais sans toutefois être démantelé, ce qui facilita le travail lors de la restauration dans les années 2000, après son achat par la mairie. Le moteur électrique avait disparu, certainement récupéré pour un autre usage, mais on pouvait trouver dans les décombres des traces de son installation, comme le montrent les photos de la fi gure 1.

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Figure 1 – Vestiges du premier entraînement électrique dans le moulin en ruine (archives de l’ARAM-MT)

On peut voir que l’entraînement électrique se faisait alors au niveau du hérisson, au moyen d’un pignon solidaire d’un axe entraîné en rotation à partir du moteur par poulie et courroie plate. Ce mode de transmission permettait le patinage indispensable pour lisser au niveau de la meule les à-coups provoqués par le démarrage relativement brutal du moteur (vraisemblablement démarrage « étoile-triangle », le plus répandu à l’époque).

Avant de poursuivre avec le moulin de Montbrun- Lauragais, il est intéressant de remarquer que d’autres moulins à vent du Midi Toulousain avaient aussi été motorisés, approximativement à la même époque : le moulin d’Aurin en 1946, au moyen d’un moteur électrique placé dans la cave et encore en place aujourd’hui ; le moulin de Montlaur en 1935, au moyen d’un moteur thermique.
Lors de la restauration du moulin de Montbrun- Lauragais, impulsée par l’Association Régionale des Amis des Moulins du Midi Toulousain (ARAM-MT) et offi cialisée en 2002 par une fête inaugurale, il n’avait pas été prévu de remettre en place cet entraînement électrique, les principaux acteurs de cette restauration estimant que seul l’aspect le plus traditionnel du moulin à vent devait être conservé.
Depuis sa restauration, de nombreuses activités à caractère culturel, touristique et pédagogique ont été développées autour du moulin grâce à l’intervention de membres de la municipalité de Montbrun-Lauragais et de l’ARAM-MT. Plus récemment, en 2009, l’association “Autour et au Moulin” a été créée de manière à pérenniser et développer les activités liées au moulin.
Le problème de la déception des visiteurs, adultes et enfants, lorsque le moulin ne tourne pas par manque de vent, ainsi que la possibilité de faire effectivement de la farine, ayant été maintes fois évoqués au cours des réunions, il a été fi nalement décidé de motoriser à nouveau le moulin.
Un fi nancement ayant été obtenu par la mairie dans le cadre de la Dotation Globale d’Equipement pour les investissements des petites communes, la conception et mise en place de la motorisation a été confi ée aux Etablissements Daumain de Ramonville Saint-Agne, oeuvrant habituellement en mécanique générale, mais possédant aussi une expérience certaine dans les techniques molinologiques.
Bien que cela eût été possible, car le pignon de l’ancien entraînement ainsi que son arbre ont été récupérés lors du démontage en vue de la restauration, il n’était pas opportun de reproduire à l’identique cet ancien entraînement. Le cahier des charges soumis à l’entreprise prévoyait plutôt l’implantation du moteur au niveau du petit fer de l’une des deux paires de meules, dans la cave du moulin, de manière à ne pas dénaturer les parties du moulin directement visibles. On notera qu’une seule paire de meules était concernée par cette motorisation, car la deuxième paire n’est pas en service mais désassemblée pour exposition au public.
Par rapport à l’entraînement au niveau de l’arbre horizontal parfois pratiqué dans certains moulins à vent, une telle implantation au niveau du petit fer permet deux types de fonctionnement : rotation de la meule et des ailes et rotation de la seule meule, à condition qu’il existe un système de désaccouplement au niveau du fer de meule.
Cet aménagement permet de satisfaire la demande des visiteurs de voir tourner les ailes tout en produisant de la farine en démonstration et donne en plus la possibilité de moudre en plus grande quantité sans entraîner les ailes. Le principe de la solution retenue par Guy Daumain pour satisfaire à ce cahier des charges est donné sur le croquis de la fi gure 2.

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Figure 2 – Principe du montage de l’entraînement sur le petit fer (croquis M. Lajoie-Mazenc)

Le moteur d’entraînement associé à son système de réduction de vitesse est fi xé sur un châssis monté sur le petit fer par l’intermédiaire de deux paliers. Un bras de réaction bloque la rotation du châssis, permettant ainsi de transmettre le couple du moteur au petit fer. Cette disposition présente l’avantage d’éviter la mise en place d’un bâti indépendant pour fi xer le moteur et d’éliminer de cette façon les problèmes d’alignement ainsi que les efforts latéraux sur la crapaudine.
Elle a l’inconvénient d’ajouter une charge supplémentaire au niveau de la crapaudine et de la trempure. Cependant, compte tenu du poids respectable de la meule (plus de 1,5 t) cette augmentation reste dans des limites acceptables. Notons aussi qu’il a été nécessaire de remplacer le petit fer d’origine et de modifi er la crapaudine pour les adapter à ces nouvelles contraintes.
La puissance du moteur asynchrone est de 7,5 kW à 1440 tr/min. Cette puissance a été choisie en se basant sur la motorisation mise en place au moulin de Saint-Lys et en tenant compte des résultats des essais que
nous y avons effectués (voir article dans les numéros 7 de janvier 2004 et 10 d’octobre 2004 du Monde des Moulins). Pour ramener la vitesse de rotation à un niveau convenable pour la meule, le système de réduction comporte deux étages : un premier étage diminue la vitesse dans un rapport de 10 au moyen d’un réducteur à roue-vis ; un deuxième étage utilise une transmission par pignon et chaîne avec un rapport de 2,25. Ce double système de réduction donne donc, à la vitesse nominale du moteur, une vitesse de 1440 / 22,5 = 64 tr/min à la meule. Sur la fi gure 3, on peut voir les différents composants de cet entraînement installé sur le petit fer dans la cave du moulin.

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Figure 3 – Vues de l’entraînement installé dans la cave du moulin (photos M. Lajoie-Mazenc)

Le moteur asynchrone triphasé est alimenté à partir du réseau, à travers une alimentation électronique à fréquence variable, qui permet à la fois un démarrage en douceur et la programmation de divers modes de fonctionnement.
Pour l’utilisation habituelle du moulin, seulement deux modes de fonctionnement ont été programmés et sont directement accessibles : rotation à vitesse nominale, soit 64 tr/min à la meule et rotation à vitesse réduite de moitié pour les démonstrations.
Pour ces deux modes de fonctionnement, il est possible d’entraîner la meule seule, ou bien la meule et les ailes, grâce au système de désaccouplement mis en place au niveau du pignon qui engrène sur le hérisson. Ce système, illustré sur la fi gure 4, permet de dégager vers le haut le pignon, en agissant sur un volant fi xé sur une douille qui se visse sur un fi letage solidaire du fer de meule.

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Figure 4 – Système de désaccouplement des ailes (photo M. Lajoie-Mazenc)

Il est important de signaler que cette motorisation électrique ne gêne en rien le fonctionnement traditionnel du moulin au vent. En effet, la transmission entre le moteur et la meule est équipée d’une roue libre, au niveau du pignon primaire de la transmission par chaîne. Avec cette roue libre, les ailes peuvent faire tourner les meules sans que le moteur soit entraîné, qu’il soit alimenté ou non.
Ces travaux de motorisation ont été habilement complétés, toujours par Guy Daumain, qui a procédé à la remise en état de la paire de meules : les surfaces travaillantes des deux meules ont été dressées et piquées, la meule tournante a été équilibrée, l’étanchéité au niveau du passage du petit fer à travers le boîtard a été revue.

Les travaux ont été menés à bien au cours du premier semestre de 2011 et le moulin a pu reprendre son activité au mois d’août 2011, avec production d’une mouture de bonne qualité quel que soit le vent et à la grande satisfaction de tous les visiteurs, écoliers et adultes.
Avec cette nouvelle possibilité d’obtenir librement et facilement de la farine, l’idée de l’utiliser sur place pour fabriquer du pain est née dans l’esprit des membres de l’association “Autour et au Moulin”. Cette idée a
fait son chemin et le projet de la construction d’un four a été établi. Ce projet devrait se concrétiser dans les mois qui viennent et contribuera ainsi à donner une nouvelle vie au moulin désormais doté du mode de fonctionnement mixte vent-électricité qu’il avait dans les années 50.

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Figure 5 – Le moulin de nos jours (photo M. Lajoie-Mazenc)

M. LAJOIE-MAZENC – Article paru dans le Monde des Moulins – N°42 – octobre 2012

Catégories : Technique

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