Le site des Moulins de France
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Malgré l’isolement où la France se trouve après l’échec de Copenhague, Grenelle I et II restent pour l’hexagone un énorme coup médiatique : la France fait ce qu’il faut pour sauver la planète ! Cependant le grand public n’en retient que la taxe carbone et les riverains l’énigmatique et bien belle Trame Verte et Bleue. Pour les salariés des sociétés d’étude et de quelques entreprises et services, c’est la promesse d’une source d’activités et pour quelques uns une aubaine de profi ts.

Les coulisses de Grenelle

Ce fut un festival de bonnes résolutions : réduction forte du CO2 pour arrêter la fonte des glaciers et du Pôle, suppression des décharges à ciel ouvert qui empoisonnent les nappes phréatiques, les rivières et la faune des mers. Ce fut la vision idyllique de rivières bleues et de vallées vertes ! Tout cela jusqu’à ce que le millier de fi nanciers qui gèrent le monde disent aux gouvernements : oui aux bonnes résolutions, mais laissez nous nos jobs, sous-entendu, cela durera bien assez longtemps… pour qu’on trouve une autre planète. Plus prosaïquement, on repart sur le train-train de la vie courante et les médias passent à autre chose. Les berges et leur quotidien restent, avec les activités courantes, liées aux mouvements de la rivière, en hausse ou en baisse.

Mais une « machine » administrative est également en route. Pour les riverains et les gestionnaires de moulins à eau équipés ou non d’hydrocentrale, Grenelle, c’est de nouveaux soucis avec une relance de la loi Pêche de 1984 et du CSP, repeint à neuf en ONEMA. C’est, suite aux brainstormings parisiens des fonctionnaires locaux, les tentatives généralisées d’anticiper sur la directive européenne CE/ 2000, en utilisant les ambiguïtés de la loi du 30 décembre 2006. En effet, tout bouge toujours à Paris !
Le rôle des lois du 21 avril 2004 et du 31 décembre 2006 est d’appliquer en France la directive CE/2000. L’objectif de ce texte européen est d’obtenir un résultat : le « bon état écologique » des milieux aquatiques en 2015, cela dans le cadre d’un Plan de Gestion devant être élaboré en 2009. Or les plans de gestion reconnus en France par Bruxelles, sont les SDAGE et SAGE. Ceux-ci, devenus « opposables aux tiers », défi nissent des objectifs de résultat à l’aide de moyens. Par exemple, pour satisfaire à la « continuité écologique » (circulation des poissons et des sédiments), l’ouverture ou la suppression des chaussées et barrages est recommandée, c’est un moyen. Là réside toute l’ambiguïté des textes français, ambiguïté assouplie par une procédure déconcentrée au profi t des préfets chargés de « concertation ». Pourquoi lors de cette concertation, le citoyen-riverain n’aurait -il pas la liberté d’apprécier comment atteindre un résultat qu’il approuve, et de choisir dans cet objectif le moyen le plus approprié à son cas particulier ?

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Site des moulins de Monsieur à Cours de Monségur et de Bary à Taillecavat sur le Dropt en Gironde. Photo E.Charpentier

L’ envers du décor

Les permanents d’associations imprudemment subventionnées depuis des années et le millier de fonctionnaires des ministères sensibilisés, sont en perpétuelle activité. Qui a dit : l’organe crée la fonction ? Un « non manuel » ne peut fonctionner en tant que travailleur de l’esprit, qu’en écrivant ou en parlant. ! Certes, mais ils peuvent se tromper. Cela s’est vu. Depuis la mise en chantier de la loi du 30 décembre 2006 et après son vote, groupes de travail, journées d’étude et colloques brassent idées et rêves. Une forte minorité, à forts moyens, trie, élimine , met en forme et teste dans des lieux favorables, ce qui va constituer des projets de décrets, d’arrêtés et de circulaires, tout un arsenal rapidement projeté au niveau des instances locales, comme résultant d’un très large consensus national ! Pourquoi ne pas permettre un réexamen à l’échelon du moulin, du cours d’eau. Regardez attentivement le contenu des SDAGE, des SAGE, des Contrats Restauration Entretien (CRE) et de quelques avis et conseils émanant de divers services départementaux, vous y trouverez de quoi vous faire quelques soucis.
Il est vrai que très peu de riverains sont informés, soit que, « nul n’étant censé ignorer la loi », personne n’ait estimé devoir vous communiquer ce qui se prépare dans les bureaux et salles de réunions; soit que, très au fait de vos papiers de famille et des lois anciennes toujours respectées, vous ne puissiez supposer que l’autorité administrative puisse vouloir changer l’ordre naturel des choses sur vos rives et moulins. C’est à l’Etat de vous prévenir, même si votre association essaie de vous informer, car vous êtes, riverains, les principaux et même parfois les seuls à être concernés.

Surprise et interprétation des lois

Il est évident qu’une administration capable d’écrire ou de réécrire en vingt ans trois mille pages de textes législatifs et administratifs, est mue par la volonté de tout contrôler et d’imposer sa vision à tout riverain. C’est cette vision qu’il faut avoir présente à l’esprit en sachant qu’elle n’est pas partagée par une grande majorité de fonctionnaires, mais que tous sont conscients de la nécessité de mieux gérer, après des décennies de négligences réelles et des erreurs de l’autorité administrative pendant la période productiviste 1955-1985, celle des Trente Glorieuses.

Une vraie surprise

Parmi nous beaucoup avaient encore confi ance dans le sens du droit qui devait prédominer dans la fonction publique et les facultés de Droit. C’est donc avec surprise que l’on a vu l’offensive contre la pratique des droits fondés en titre et sur titre. Certains veulent
effacer un siècle de jurisprudence par des « commentaires » ne retenant que ce qui peut aller dans le sens d’un amoindrissement du contenu juridique du caractère du droit de fondé en ou sur titre. Cela fut révélé par un membre de phrase de l’article 8 du projet de la dernière loi : « à compter du 1er janvier 2014, les anciens règlements et usages locaux qui n’ont pas été mis à jour cessent d’être en vigueur ». Quelle mise à jour ? Conjointement, les anciennes controverses hostiles aux droits fondés en titre , privilèges
féodaux, propriété abusive, leur caractère administratif, le non-usage etc… donnent lieu à des messages non équivoques. Cela encourage la reprise d’initiatives locales menaçantes auprès des moulins à eau qui auraient des projets de production familiale d’électricité ou de rénovation de leur installation. Heureusement, face à cela, la jurisprudence du Conseil d’Etat et de la Cour de Cassation reste aussi ferme pour la protection des droits des moulins fondés en titre.

Ambiguïté dans les lois récentes

Les conséquences pratiques des «Grenelle» ne sont aujourd’hui que la suite logique de l’envers du décor qui mélange contestation des droits antérieurement acquis et nouvelle interprétation des lois par l’autorité administrative. Au nom du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs, il n’est pas anormal qu’Exécutif et Pouvoir Judiciaire, n’ayant pas les mêmes impératifs, s’opposent, car les contraintes des uns et des autres ne sont pas les mêmes. Derrière la Trame Verte et Bleue transparaissent des oppositions de nature complexe où se mêlent intérêts matériels et idéologiques. La poésie des bancs de sable se déplaçant sous la brume vers le bouclier vaseux de l’estuaire de la Loire, le premier fl euve sauvage d’Europe, cache mal les intérêts de la loi Pêche. La valeur culturelle du patrimoine et celle sociale du tourisme recouvrent également des  intérêts. La production d’électricité est, elle, ouvertement économique. D’où la nécessité démocratique pour les pouvoirs publics, de ne pas se laisser envahir d’actes reposant sur des fondements scientifi ques incertains ou de simples préjugés, et de refuser les pseudo-consensus et les concertations d’où seraient écartés les seuls partenaires directement concernés, les riverains.

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Ce qu’il faut savoir

Pour l’année 2010, les moulins à eau sont sous le régime des fondés en titre dont la consistance légale est à durée illimitée ou sous le régime des fondés sur titre dont le contrat garantit leurs droits jusqu’à l’échéance fi xée. Les travaux d’entretien et de restauration à l’identique se font librement. Pour les travaux neufs qui excéderaient la consistance légale, ils sont soumis à la règle de l’autorisation ou de la déclaration selon les tableaux des décrets du 29 mars1993, révisés selon l’article R 214-1 du Code de
l’Environnement après la loi du 30 décembre 2006. 

Conseil

Il vous faut donc lire tout ce qui peut vous venir de l’Administration ou d’un service quelconque en fonction de ce qui précède et ne pas l’oublier, car il peut y avoir des délais de réponse. En ce qui concerne les mesures nouvelles ou modifi ées par les textes d’application de la dernière loi, telles que le classement de cours d’eau en deux catégories (art L 214-17 du Code) et leurs conséquences éventuelles que l’on voudrait vous imposer en fonction des caractéristiques de votre moulin qui seraient différentes de celles
de l’origine, que ce soit au niveau des débits réservés ou minimaux, d’équipements dits obligatoires et de redevances, attendez une notifi cation écrite et prenez contact avec votre association. Il est vraisemblable que votre statut actuel vous exonère de ces mesures nouvelles. Attendons le résultat des actions menées au niveau national pour ensuite rendre plus réalistes et utiles des mesures adaptées au niveau de votre section de cours d’eau et justifi ées par le désir de tous d’avoir une eau au moins aussi propre qu’il y a soixante ans et une nature plus riche et vivante qu’aujourd’hui.

Michel DES ACCORDS – Article paru dans le n°32 du Monde des Moulins – avril 2010

Catégories : Législation

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