Le site des Moulins de France
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Cette gigantesque usine de quatorze roues fut commandée par LOUIS XIV pour alimenter, en eau de la Seine, à raison de 5000 m3 par jour, les nombreux bassins, fontaines et cascades du château de Versailles, en élevant les eaux pompées à une altitude de plus de 200 mètres.

Il s’agissait de faire monter, en trois étapes de 59 mètres chacune de dénivellation, l’eau de la Seine à la côte 195, sur une distance de 1200 mètres. De là, l’eau s’écoulerait par gravité vers de grands réservoirs de stockage, qui alimenteraient par une pente douce les jeux d’eau du Parc de Versailles, et plus tard, le Parc de Marly.

Quelques chiffres :
Le projet fut réalisé sur la commande de Louis XIV (quatorze roues… de 12 mètres de diamètre), de 1681 à 1684 par 1800 ouvriers. Il a nécessité d’énormes terrassements, une quantité impressionnante de matériaux fut mise en oeuvre. 800 tonnes de plomb, autant d’acier, 17 000 tonnes de fer et près de 100 000 tonnes de bois ! De quoi mobiliser nos Amis de l’Association des Moulins d’Ile de France (1) pendant plusieurs décennies…
Bien que ce fût le plus grand ouvrage hydraulique de l’époque, la machine fonctionne 133 ans, c’est-à-dire jusqu’en 1817. L’arrivée de la vapeur et ensuite l’électricité en ayant eu raison, avec le temps.

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1. Gravure de 1688. On voit ici 13 roues en action, la 14ème étant très visible en construction en atelier de charpente, en haut à droite.

Comment fonctionnait la machine ?

Les 14 moteurs hydrauliques étaient actionnés par une chute d’environ 2 mètres. Le mouvement de rotation fourni par chacun d’eux était transmis par deux systèmes indépendants : soit faire fonctionner le premier étage des pompes, à même la Seine, soit transmettre le mouvement à de nombreuses pompes situées sur deux étages successifs équipés de bassins et puisards.

Pour limiter les désordres de fonctionnement et réduire les efforts mécaniques, plus de 250 pompes assuraient la montée des eaux : 64 puisaient dans la Seine, et 78 à chacun des étages, les autres récupéraient les fuites. L’eau arrivait enfin dans une galerie de 36 arches et longue de 643 mètres. Cette galerie, revêtue en plomb de 2 mètres de hauteur sur 1 mètre de large conduisait les eaux vers les réservoirs de Louveciennes, d’une capacité de 700 000 m3. Leur niveau est de 37 mètres au dessus de la terrasse du Château de Versailles. Un aqueduc souterrain de 6 kilomètres les y conduisait par gravité. Cette usine était quasiment autonome avec ses bureaux administratifs, logements d’habitation, écuries, forge, scierie, fonderie où se fabriquaient les tuyaux et les chaînes de chevalets.

Entretien de la machine

La complexité de la machine, de l’ensemble des canalisations, pompes et de leur mécanisme, nécessitait un  personnel nombreux et spécialisé :
– 20 charpentiers
– 14 forgerons
– 15 manoeuvres
– 4 poseurs de tuyaux
– 3 scieurs de long
Ainsi que des plombiers, fondeurs, goudronneurs, graisseurs, poseurs de tuyaux et fontainiers.

L’usure des pièces était considérable, d’autant qu’elles étaient soumises à de nombreux à-coups, tant en raison des variations du niveau de la Seine, que de la complexité des installations.

De plus, les contraintes de pression se situaient à la limite des matériaux utilisés. On ne connaissait que le cuir et le plomb pour assurer les joints entre les tronçons de tuyaux, ou autour des clapets des pompes. 

La machine et l’environnement

Cet immense ensemble hydraulique, qui dans un premier temps montait 5000 m3 d’eau de la Seine vers les Châteaux de Versailles et de Marly, fut un sujet d’émerveillement, pour l’époque, tout autant que pour la FDMF, aujourd’hui.

“Cette machine, la plus belle et la plus extraordinaire dont on ait entendu parler jusqu’à présent, est située sur un bras de la rivière Seine (PIGANIOL DE LA FORCE)”.

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2. Vue générale des installations vers 1715.

Mais la complexité de son appareillage et les difficultés techniques que l’on ne savait résoudre en faisaient aussi une source de nuisances considérables.

“Ces efforts redoutables et ces gémissements 
Cet appareil de fer et ces grands mouvements 
Offrent partout au sens la nature offensée 
Elle semble gémir d’avoir été forcée 
En cédant â regret aux entraves de l’art 
Aux caprices des rois se plaint d’avoir part” 
Mme d’HOUDETOT -1778

Sur le site

Musée Promenade de Marly le Roi – Louveciennes
Tél : 01 39 69 06 26
Du mercredi au dimanche de 14h à 18h.
Cette présentation a pour but d’expliquer l’histoire et le fonctionnement de ce chef d’oeuvre de la technique aux XVIIème et XVIIIème siècles. Il subsiste encore d’importants vestiges. Le site est désormais exploité par le Syndicat des Eaux de Versailles et St-Cloud.

Les grandes dates de l’histoire de la machine de MARLY

1698 : Projet du Chevalier Arnold de VILLE et du charpentier Rennequin SUALEM, tous deux Liègeois.
1681 à 1684 : Construction de la machine par 1800 ouvriers.
13 juin 1684 : Inauguration par le roi Louis XIV de la machine élevant 5 000 m3 / jour.
1717 : Visite du tsar PIERRE Ier de Russie.
1750 : Alimentation en eau de la ville de Versailles.
1758 : Incendie partiel de la machine.
1784 : Visite du président des Etats-Unis T. JEFFERSON.
4 décembre 1802 : Décret du premier Consul BONAPARTE ordonnant le remplacement de la machine (qui n’élevait plus que 200 m3 par jour).
1807 : Projet de l’ingénieur PERIER machine actionnée par la vapeur (abandonné 1811).
1808 : Visite de l’empereur NAPOLEON 1er.
1811 : Machine hydraulique provisoire de CECILE et MARTIN (2 roues à aubes et une machine à vapeur).
25 Août 1817 : Arrêt définitif de la première machine et démolition.
1826 : Visite du Roi Charles X.
1827 : La machine de Cécile et Martin est complétée par une chaudière à vapeur.
1852 : Visite du Prince Président LOUISNAPOLEON.
1854 : Visite de l’Empereur NAPOLEON III.
1855 : Visite de la Reine VICTORIA d’Angleterre.
1855 à 1859 : Construction de la machine hydraulique de DU FRAYER, débit régularisé à l’aide de l’air comprimé.
9 juin 1859 : Inauguration de la machine de DU FRAYER pouvant élever 20 000 m3/jour.
1870-1871 : Arrêt de la machine par suite de la guerre.
1880 : Forage de puits dans la nappe aquifère sous la Seine.
1896 : Alimentation en eau à partir des forages.
20 juin 1963 : Arrêt de la machine de DU FRAYER en raison des nuisances.
1967 : Démolition de la machine et construction d’un barrage sur la Seine.

Jean MOREAU – Article paru dans le Monde des Moulins – N°19 – janvier 2007

Catégories : Histoire

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